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mardi, 08 août 2023

Quand l’Allemagne se réveillera…

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Le billet de Patrick Parment

On a tout lieu de désespérer de l’Allemagne depuis qu’elle est aux mains de sociaux-démocrates, totalement aliénés aux normes du très anglo-saxon libéralisme larmoyant des droits de l’homme. On croyait également que largement lobotomisés par le masochisme freudien américain depuis la défaite de 1945, et dont le symbole fut le chancelier Adenauer, l’Allemagne ne s’en remettrait pas. Il semblerait qu’il n’en est rien avec l’émergence de l’AfD (Alternative für Deutschland), un parti politique né en 2013 qui préconisait la dissolution de la zone euro, avant qu’Angela Merkel ne décide, en 2015, d’accueillir un million de réfugiés. Depuis, l’AfD est la petite bête qui monte de la politique allemande, au point d’effrayer les poids lourds du CDU. Et ce n’est pas un hasard si l’AfD a connu ses premiers succès dans l’ex-RDA, le communisme ayant protégé ses habitants des affres de la société de consommation. En Allemagne de l’est, la culture allemande jouit encore d’une authenticité que ne connaît quasiment plus sa partie ouest. C’est dire si le réveil au réalisme politique est une bonne nouvelle.

Dimanche 6 août, l’AfD a tenu son congrès dans la ville de Magdebourg (Land de Saxe-Anhalt), en Allemagne orientale, et ses conclusions détonent avec ce que l’on entend d’ordinaire de la part des différents partis identitaires européens. A l’exception toutefois du thème de l’immigration, revendication commune à tous. Marine Le Pen a bien tenté de fédérer tous les identitaires dans un groupe unique à Bruxelles, elle n’y est tout simplement pas parvenue. Ici aussi, et une nouvelle fois, les Polonais campent sur des positions purement polonaises. Plus surprenante est la position des Italiens dont le nouveau leader de Forzia Italia, Antonio Tajani a déclaré : « Il n’y a aucun problème à sceller un accord avec la Ligue de Salvini, mais notre parti en tant que membre du PPE ne fera pas alliance avec l’AfD allemande ni avec le parti de Mme Le Pen. Il s’agit de deux forces hostiles à l’Europe, et on ne peut pas gouverner avec elles à Bruxelles.”

Le congrès de l’AfD est intéressant à plus d’un titre et n’est d’ailleurs pas très éloigné dans son esprit des positons d’un Eric Zemmour. A Magdebourg, l’AfD présentait son programme en vue des élections européennes de 2014 et le moins qu’on puisse dire est qu’il est radical.

Celui-ci préconise en effet la fin de l’espace Schengen et le retour du contrôle des frontières nationales. Son abrogation nécessitera donc la renégociation des traités. Il prône par ailleurs la dissolution du Parlement européen, la nomination par l’Allemagne des magistrats de la Cour de justice et le retrait de la zone euro. Vu sous cet angle, l’AfD prône tout simplement le retour du Deutsche Mark, ce qui signifierait la mort de l’euro. Mais le plus original de ce calendrier est la critique radicale de aliénation allemande aux Etats-Unis qui maintiennent toujours une force armée importante dans le pays. Et d’exiger le rétablissement des liens avec la Russie. A l’AfD, contrairement à ses adversaires, on sait lire une carte de géographie.

Comme le résume Hans Neuhoff, délégué de Bonn et futur candidat : «  L’Europe doit constituer un propre pôle au sein de l’ordre mondial multipolaire et s’émanciper de toute prétention de grande puissance à vouloir diriger. Si elle ne le fait pas, l’apolitisme et le chaos menacent ». Si l’AfD ne préconise pas de sortir de l’Union européenne, elle qualifie néanmoins d’échec l’union des Vingt-Sept et suggère d’élaborer une « communauté économique d’intérêts européenne ».

« Ce que nous devons vraiment craindre, ce n’est pas le changement climatique d’origine humaine. C’est le changement de population provoqué par l’homme, qui transformera la vieille Europe en une zone de peuplement pour des millions d’Africains et de Marocains », a déclaré pour sa part Irmhild Bossdorf, déléguée de Rhénanie-du-Nord- Westphalie, dans la partie ouest de l’Allemagne. Ce même mot est étroitement accolé à l’islam (vingt-deux occurrences), lui- même accusé de propager l’antisémitisme.

Sur le plan diplomatique, l’ancrage occidental et atlantique de l’UE semble partiellement remis en question même si l’adhésion à l’Otan n’est pas remise en cause. « L’Allemagne n’est pas un pays libre et souverain. Elle est occupée par les États-Unis, militairement, politiquement, économiquement et dans l’esprit », s’est plaint un élu bavarois, Jurij Kofner, épousant l’angle d’attaque favori du Kremlin. Pour sa part, la tonalité du programme est plus neutre, estimant que les « intérêts économiques des États-Unis diffèrent de plus en plus de ceux de l’Europe». Tout en déplorant « les souffrances » causées par la guerre en Ukraine, le parti appelle à « œuvrer pour la paix dans les relations germano-russes », ce qui passe notamment par la levée des sanctions.

Les prochaines élections européennes marqueront peut-être un tournant dans l’équilibre des forces au sein de l’Union européenne, tant la montée des partis nationalistes dans chaque pays ne cesse de progresser. Mais cette prise de conscience que l’Europe doit s’émanciper de ses liens trop étroits avec une Amérique qui fait tout pour que celle-ci n’existe pas, est un premier pas vers l’émancipation.

07:31 Publié dans Le Billet de Patrick Parment | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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