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mardi, 04 avril 2023

Dresseur de tigre

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Philippe Gélie

En 2018, lors de son premier voyage présidentiel en Chine, Emmanuel Macron avait, tout feu tout flamme, proposé de jouer les médiateurs entre Xi Jinping et... le dalaï-lama. Nul ne l’avait sollicité et l’on sait ce qu’il en est advenu : rien. Cinq ans plus tard, c’est un chef de l’État nettement plus émoussé qui se lance dans un exercice diplomatique de haute voltige : établir, avec le meilleur allié de Vladimir Poutine et pire ennemi de Joe Biden, des relations équilibrées permettant à l’Europe et à la France de tirer leur épingle du jeu. Un jeu international de plus en plus brutal, dans lequel le Vieux Continent cherche à exister entre le bras de fer sino-américain et l’alliance « sans limite » russo-chinoise, attisés par la guerre en Ukraine.

Il a fallu trente ans à nos dirigeants pour sortir doucement du rêve d’un alignement des puissances dans l’orbite libérale et capitaliste de l’astre américain. Les règles du commerce mondial allaient normaliser la Chine comme l’irruption du capitalisme allait démocratiser la Russie. Raté. Nous voilà avec deux mastodontes décidés à s’associer pour instaurer un nouvel ordre mondial débarrassé des diktats moraux et politiques des Occidentaux. Un ordre international « à bas coût », selon la formule du sinologue François Godement, dans lequel les gros dévorent les petits. Dans la posture du dresseur, il est douteux qu’Emmanuel Macron, même flanqué de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, impressionne beaucoup le tigre.

Le Français court au-devant de désillusions avec son homologue chinois tout juste revenu de Moscou. Soucieux d’affichage dans la cour des grands, le président pourrait tirer gloriole d’un coup de fil de Xi à Zelensky, du refus réaffirmé de livrer des armes à Moscou ou d’un simple engagement en faveur de la paix en Ukraine. Pour le reste, ce sera un cocktail d’endiguement là où Pékin menace nos intérêts et de coopération là où elle reste possible. L’empereur rouge veut amadouer l’UE pour ne pas se priver de son marché au moment où il subit déjà des sanctions américaines. Mais il ne déviera pas de sa trajectoire, qui vise à asseoir la domination de son modèle autocratique à travers le monde. Les Européens espèrent tout au plus en freiner la course.

Source : Le Figaro 4/4/2023

10:10 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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