lundi, 02 mai 2011
LE GANGSTERISME MONDIALISTE...
Editorial de Militant
La guerre déclenchée contre la Libye en mars 2011 oblige à traiter de la "guerre juste" et du "droit d'ingérence". L'ordre politique du monde repose sur le principe de la souveraineté des Etats qui garantit la liberté des nations à maîtriser leur destin en pleine indépendance, même si celle-ci dépend des rapports de forces internationaux. Corrélativement, le principe de non ingérence dans les affaires d'un Etat souverain règle le droit international.
Comme l'a précisé Thomas d'Aquin, pour qu'un Etat entre en guerre de manière licite contre un autre Etat, il faut qu'il y ait une "juste cause", c'est-à-dire une agression préalable, ou du moins une menace réelle et immédiate : tel n'est pas le cas ici, Khadafi n'ayant agressé aucun Etat souverain. Les mêmes constatations peuvent être faites à propos de la Serbie en 1999 et de l'Irak en 2003. Tous ces conflits sont donc illicites car ils provoquent des maux et désordres plus graves que le mal à éliminer ; en fait ils traduisent l'impérialisme agressif des puissances dominantes du moment, atteintes de démesure.
Or le principe de "droit d'ingérence" est invoqué de plus en plus souvent pour justifier l'attaque d'un pays souverain par la "communauté internationale", nom pudique donné au groupe d'Etats dominés ou inféodés aux Etats-Unis. La notion d'ingérence n'est pas nouvelle : elle remonte au juriste Grotius (1583-1645) qui expliquait qu'en vertu du "droit naturel" commun à tous les peuples en toutes époques, chaque Etat était lié par des obligations universelles dont la violation grave autorise les Etats voisins à intervenir dans ses affaires intérieures.
L'idée peut se défendre, à condition qu'elle s'applique à tout Etat. Or c'est loin d'être le cas. L'histoire récente le montre amplement : en Yougoslavie en 1993, en Irak en 2003, mais aussi en Ukraine, en Biélorussie où la "communauté internationale" s'arrogea le droit de décider de la validité des élections, en Autriche ostracisée pour avoir formé un gouvernement avec l'"d'extrême droite" ou en 2011 avec la Hongrie de Viktor Orban. Mais la "communauté internationale" s'est bien gardée d'intervenir en Chine lorsque Pékin réprimait les révoltes au Tibet et au Xin jiang ; ou contre la Turquie après l'invasion de Chypre, sans oublier Israël qui écrase les Palestiniens. Elle ne s'attaque qu'aux faibles !
De même la Cour pénale internationale se permet de juger les chefs d'Etats dérangeants, de petits Etats évidemment, mais un Clinton qui a agressé la Serbie, un Bush qui a agressé l'Irak, les tortionnaires des prisons d'Abou Graïb ou de Guantanamo y échappent, les Etats-Unis n'ayant pas reconnu ce tribunal.
En outre, sachons qu'une révolte anti régimiste aux Etats-Unis ou en Europe serait sans nul doute réprimée avec la dernière énergie et l'on nous expliquerait alors que cela est justifié dans la mesure où, ces Etats étant des démocraties, toute contestation d'un système aussi perfectionné ne peut être que l'œuvre de criminels !
En 2011, après la Côte d'Ivoire où la "communauté internationale" a décidé qui devait être président, ignorant la réalité ethnique de cet Etat post colonial artificiel, voilà la Libye attaquée au non de la "morale internationale", par des armées qui outrepassent délibérément la légalité internationale fixée par le mandat de l'ONU en la bombardant pour empêcher le pouvoir légal de rétablir son autorité comme c'est, en principe, le devoir de tout pouvoir. Mais, dans le même temps, les mêmes aident l'émir de Bahrein à réprimer la révolte de son peuple, tant il est important de protéger le quartier général de la VIe flotte américaine !
Les motifs réels de l'intervention en Libye sont encore mal élucidés. Raisons de politique intérieure française avec un Sarkozy en mal de popularité ? Tentative américaine de mieux contrôler une région qui lui échappe suivant son projet de "remodelage du Proche-orient" et de renforcer la sécurité de l'Etat d'Israël, ce pivot de l'ordre mondial actuel ? Intérêts pétroliers ? Bêtise tout simplement ?
Toutefois, Khadafi, s'il n'est pas des plus présentables, a développé la Libye, Etat artificiel tribal et la "communauté internationale" n'a pas hésité à copiner outrageusement avec lui. Comme Saddam Hussein, supplétif des Occidentaux contre l'Iran, il est bien mal remercié de s'en être rapproché à partir de 2003. Tout au plus peut-on dire que les Occidentaux détruisent ainsi les matériels militaires qu'ils ont été contents de vendre avec bénéfice à des Etats incapables de les fabriquer !
L'application du "droit d'ingérence" n'est qu'une arme supplémentaire d'apparence "propre" mais percluse d'hypocrisie dont s'est dotée la partie actuellement la plus puissante du monde, autrement dit le "cache-sexe" de l'impérialisme yankee et des groupes de pression apatrides et mondialistes qui le dirigent. Il est le symbole d'un gangstérisme planétaire institutionnalisé.
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