mercredi, 29 août 2018
L’avenir de la France, c’est ça ?
Bruno Gollnisch
Nicolas Hulot a annoncé ce matin (mardi matin - NDLR) sa démission du gouvernement, refusant de jouer plus avant les faire-valoir et les potiches, dénonçant l‘influence des lobbies « dans les cercles du pouvoir. » Celui de la chasse n’est pourtant pas le plus néfaste ni le plus important, mais le ministre de la transition écologique ne l’ignore certainement pas… Un nouveau coup dur pour l’exécutif sachant que selon la dernière étude Ifop publiée par Le Journal du dimanche, 66 % des Français interrogés en août sont mécontents de l’action du président de la république, en hausse de 5 points par rapport au mois de juillet. Un contrecoup des affaires Nyssen, Kolher, Benalla ? Peut-être, mais pas que, et il est certain que la (légère) euphorie de nos compatriotes post coupe du monde parait déjà très loin. Ce même sondage indique que la cote de popularité d’Emmanuel Macron a atteint son plus bas niveau depuis son élection, là aussi en forte chute de cinq points en août par rapport au mois précédent, avec 39% d’opinions favorables ; un effondrement comparable touche également son Premier ministre républicain-en marche Édouard Philippe. Un état de l’opinion qui laisse présager des mois à venir très difficiles pour le gouvernement sur fond de croissance en berne, loin des 2% en 2018 comme l’avait claironné le gouvernement et certainement très en deçà aussi en 2019 comme l’a avoué le 1er août le ministre des Comptes publics, l’ex-sarkozyste Gérald Darmanin. Une mauvaise nouvelle pour la réduction des déficits publics. D’autant que sur fond de montée des insécurités sociale, économique, identitaire, des dossiers très chauds attendent le gouvernement en cette rentrée. Il s’agira de justifier une nouvelle attaque fiscale de la majorité présidentielle contre les retraités, la mise en place d’une nouvelle politique de discrimination positive en faveur des banlieues plurielles, la réforme de l’hôpital, de la fonction publique, de l’Etat…
Les acteurs de cette rentrée politique ont déjà en ligne de mire les élections européennes de mai 2019 qui arrivent à grands pas et qui sont annoncées par toutes les familles politiques comme un referendum grandeur nature pour une contre le macronisme, pour ou contre l’inféodation de notre pays à la feuille de route de la Commission européenne, pour ou contre cette Europe de Bruxelles.
Une conjoncture à la lumière de laquelle il s’agit de décrypter une nouvelle fois le traditionnel discours de rentrée prononcé hier par Emmanuel Macron à la conférence des ambassadeurs de France, réunis à l’Élysée.
En adepte éprouvé du en même temps, le président de la République a mêlé dans son intervention données factuelles et contre-vérités, propos de bon sens et idéologie antinationale, désir d’émancipation et gage de soumission à l’oligarchie mondialiste. Il a redit son souhait d’un renforcement de la construction européenne, quitte à mettre en place une Europe « à plusieurs cercles », tout en prônant conjointement, en une formule aussi floue qu’ambiguë le « renforcement de l’ordre mondial», auquel personne ne pourra s’opposer assurait déjà Nicolas Sarkozy en son temps…
Ainsi, l’ex-banquier a-t-il avancé, comme ses calamiteux prédécesseurs, que les « alliances d’aujourd’hui », comme l’Otan, avaient « encore leur pertinence » (sic) mais a ajouté non sans raison que les Européens « (devaient) tirer toutes les conséquences de la fin de la guerre froide », en n’attendant plus des Américains qu’ils se chargent de les défendre, souhaitant une « réflexion exhaustive sur ces sujets avec tous les partenaires de l’Europe et donc avec la Russie. » L’« on ne peut pas construire l’Europe sans réfléchir aux relations avec la Russie et la Turquie » a-t-il encore précisé arguant par ailleurs qu’il s’agirait de « sortir de l’hypocrisie » vis-à-vis d’Ankara en ne promettant plus aux Turcs une adhésion à l’UE, mais plus raisonnablement un partenariat stratégique
Une politique militaire (mise en place du Fonds européen de défense, « accords stratégiques» avec l’Allemagne…) qui doit advenir au nom d’une « souveraineté européenne », laquelle, dans l’esprit de M. Macron est amenée à prospérer sur les ruines de nos souverainetés nationales… Ce vœu de voir les pays de l’UE renforcer leurs efforts de coopération militaire pour assurer leur protection est d’ailleurs peu ou prou le message martelé depuis sa campagne présidentielle par Donald Trump qui a dit son ras-le-bol de payer pour la sécurité des Européens…
Si « le dialogue avec Washington reste essentiel », le successeur de François Hollande a cependant fustigé (au nom de son souverainisme européen ?) la politique isolationniste de M. Trump, « symptôme de la crise capitaliste contemporaine. » « La première menace qui pèse sur nos biens communs, c’est la crise du multilatéralisme lui-même. Le multilatéralisme traverse en effet une crise majeure qui vient percuter toutes nos actions diplomatiques, avant tout en raison de la politique américaine (…). Le partenaire avec lequel l’Europe avait bâti l’ordre multilatéral d’après-guerre semble tourner le dos à cette histoire commune. » Histoire commune toute relative puisque les Etats-Unis se sont construits historiquement, politiquement, culturellement sur leur opposition voire un certain rejet, une certaine hostilité vis-à-vis de de la vieille Europe. Et il n’est pas certain que certains cénacles à Washington auraient hésité à vitrifier les villes européennes si la guerre avait éclaté contre la Russie soviétique.
Passage obligé (?), M. Macron n’a pu s’empêcher de débiter l’habituelle et assez pathétique propagande contre la République Arabe Syrienne, s’inquiétant de ce que l’armée syrienne parachève la reconquête du pays en éliminant les dernières poches aux mains des milices islamistes, notamment dans la région d’Idlib. Le gouvernent de Damas a été chargé de tous les maux, de toutes les culpabilités dans le conflit qui accable ce pays depuis 2012, arguant que le maintien de Bachar el-Assad au pouvoir en Syrie serait une « erreur funeste. » Quand bien, même la responsabilité des occidentaux dans ce sanglant conflit, la patte des atlantistes et de leurs alliés dans l’instrumentalisation, voire le soutien aux milices djihadistes qui ont mis ce pays a feu et à sang, n’est plus à démontrer.
Last but not least, les populistes et autres nationalistes ont été eux aussi désignés à la vindicte, tous ceux qui comme Viktor Orban, Matteo Salvini, menacent le projet cosmopolite bruxellois qualifié par antiphrase d’européen. « Ce combat européen ne fait que commencer, il sera long, il sera difficile» car, a fulminé Emmanuel Macron, « les identités profondes des peuples ont resurgi avec leur inconscient collectif. » « Les extrêmes ont progressé et les nationalismes se sont réveillés. Est-ce une raison pour abandonner ? Certainement pas (…). Il faut en réalité redoubler nos efforts. » Bref, la reprise ici de ses attaques contre la lèpre populiste, de ses propos tenus en juillet devant le congrès où il affirmait : « Il faut le dire clairement, la frontière véritable qui traverse l’Europe est celle, aujourd’hui, qui sépare les progressistes des nationalistes. »
Aussi s’agit-il, a encore expliqué le président de la république, de construire « un modèle humaniste de la mondialisation », au nom « d’une volonté de souveraineté européenne ». « Le rôle de la France est de proposer une voie humaniste pour relever ces défis. »
Pas sûr que les Français mordent à cet hameçon empoisonné, à l’heure ou les peuples, note Bruno Gollnisch, plébiscitent le retour aux frontières, aux protections, au fait national, au maintien des identités particulières. En février dernier, rapportait l’Afp, un sondage OpinionWay réalisé pour la sixième édition du Printemps de l’Economie, indiquait que 60% des sondés ont une mauvaise opinion de la mondialisation, dont les effets négatifs sur nos salaires, nos emplois. étaient pointés par une majorité des Français. 71% se disaient pessimistes sur les effets de ladite mondialisation pour l’avenir des prochaines générations, et 67% pour l’avenir de la France.
Enseignement capital de cette étude, Pierre-Pascal Boulanger, président-fondateur du Printemps de l’économie, relevait très justement que « l’écart se resserre entre catégories populaires et favorisées, entre supposés perdants et supposés gagnants de la mondialisation », 62% des catégories socio-professionnelles supérieures (CSP+) et 71% des CSP - sont pessimistes pour l’avenir de la France. » « Le ressenti pessimiste gagne fortement les catégories les plus favorisées, qualifiées, les mieux rémunérées »… Ceux-là même, noterons-nous, qui ont assuré la victoire de M Macron, lui ont donné une majorité en se déplaçant assez massivement pour voter. La roue tourne.
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