Les émeutes qui ont eu lieu partout en France après la victoire du PSG en Ligue des champions continue d’avoir des répercussions politiques et médiatiques. Notre chroniqueur Pierre Boisguilbert revient sur l’utilisation du terme « barbares » par Bruno Retailleau pour désigner les émeutiers, scandalisant les observateurs politiquement corrects.
Polémia
La victoire footballistique du Paris Saint-Germain a provoqué, comme c’était inévitable, affrontements et pillages. Et chaque fois on dénonce des « barbares ».
C’est vrai et faux à la fois car ce sont des barbares qui se comportent comme cela mais ce sont aussi sauvages. Il faudrait arrêter de tout confondre. Le barbare, c’est fondamentalement l’étranger qui ne parle pas la langue. Ainsi, pour les Grecs, dont tout procède, les Perses sont des barbares. Mais ce sont aussi les créateurs d’une civilisation magnifique. Les Grecs jugeaient cette civilisation inférieure sur le plan des structures politiques. Pour les Romains, les barbares étaient inférieurs dans d’autres aspects et même dans le civilisationnel. Les Gaulois, dont on découvre chaque jour de nouveaux joyaux, étaient pour les Romains des barbares. C’était pire encore pour les Germains avec, dans le temps, ces invasions barbares qui pour les Allemands sont une grande migration… Comme quoi, le vocabulaire et le choix des mots structurent l’histoire.
Barbares et sauvages
Les barbares parfois se comportent comme des sauvages. Ils ont pillé Rome, mais les Romains ont pillé Jérusalem. Leur but, et c’est l’essentiel, n’était pas de détruire l’Empire romain, mais de s’y intégrer pour le revivifier, car l’Empire était un exemple indépassable pour eux. Avec les migrations de notre époque que certains vivent comme des invasions, il y a une différence majeure. L’objectif n’est pas de revigorer une civilisation en déclin ou en danger, mais de la remplacer pour différentes raisons, c’est tout autre chose. Ce sont alors des barbares au sens antique car ils se revendiquent étrangers. Mais ce sont surtout des sauvages – car ces barbares peuvent se comporter comme des sauvages. Ils pratiquent une forme de vandalisme adapté à l’époque et proche des razzias d’autres espaces culturels et religieux. Les barbares ne sont pas toujours des sauvages, nos racailles le sont.
Barbares modernes ?
Chevènement a porté tort à la force de la distinction en parlant de « sauvageons », de petits sauvages somme toute assez sympathiques finalement. Depuis, on a changé de dimension d’intensité et d’époque. C’est frappant quand on compare le triomphe sur les Champs de la Coupe du monde de 1998 avec celle de la Coupe d’Europe de 2025. Les Champs-Élysées noirs de monde à l’époque, avec une récupération politique massive déjà qui aura duré l’espace d’une respiration. Un message qui pouvait passer et auxquels certains pouvaient encore croire sincèrement dans une ambiance largement festive sans trop de casse. Ceux qui n’y croyaient pas cependant avaient raison. Aujourd’hui, Macron tente laborieusement de reprendre le message. Les vainqueurs, magnifiques par ailleurs sur le plan sportif, défilent sur ce qui fut la plus belle avenue du monde, sur des Champs vidés de la moitié de leur espace par sécurité, alors que les rues voisines sont livrées aux exactions de sauvages. Ceux-ci sont d’abord des sauvages avant de devenir des barbares car de plus en plus étrangers à ce que nous sommes. Mais arrêtons de diffamer les barbares historiques qui méritent mieux que cet amalgame anachronique.
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