dimanche, 01 juin 2014
Marisol Touraine déclare la (énième) guerre au tabac...
de Philippe Randa
Marisol Touraine en son Ministère perché entend pourfendre les fumeurs par une nouvelle série de mesures coercitives dès la mi-juin.
D’abord, rendre chaque paquet neutre (ou générique), comme cela se fait en Australie depuis 2012 : tous ont la même couleur, la même police d’écriture : à loi stalinienne, esthétique soviétique comme il se doit.
Ensuite, interdire la cigarette électronique dans les lieux publics… Et tant pis pour ceux qui parviennent ainsi à s’affranchir de leur accoutumance au tabac, car comme le rapporte l’hebdomadaire Le Point (30 mai 2014) « une étude récente, publiée dans la revue britannique Addiction, évalue qu’un fumeur a 60 % de chance en plus d’arrêter de fumer avec l’aide d’une e-cigarette qu’avec sa seule volonté. Mais Marisol Touraine craint de voir l’addiction à la nicotine se développer, notamment chez les jeunes, par le biais des e-cigarettes. Et tant pis si des médecins soulignent que la nicotine est inoffensive et que seule la fumée tue. »
Autre scandale, l’aide au sevrage par le recours à des substituts nicotiniques en augmentant de 50 à 150 euros le forfait pour les moins de 30 ans, les bénéficiaires de la CMU (couverture maladie universelle) et les malades du cancer : « Il s’agit là d’une victoire des laboratoires pharmaceutiques sur les partisans de la cigarette électronique », fait fort désobligement remarquer de son côté Le Figaro.
Le bannissement des fumeurs, toutes catégories confondues, des seuls lieux publics ne suffisant pas à l’évidence à calmer les talibans, Dame Touraine parle d’interdire également le tabac dans les véhicules privés au nom de « la protection de l’enfance ». Il s’agit certes pour l’instant d’une simple annonce d’intention, sans doute pour tester des réactions de cette violation d’un premier lieu privé… À quand des contrôles au domicile familial ?
Enfin, comble de l’hypocrisie, Marisol Touraine entend faciliter les actions collectives des fumeurs pour que les cigarettiers soient amenés à payer de très lourds dommages et intérêts… mais en aucune façon, obliger ces derniers à changer leurs pratiques autrement plus criminelles concernant l’addiction à leurs marchandises, soit l’ajout au tabac de molécules renforçant l’accoutumance. Une fois le tabac séché, des addictifs adoucissent en effet son âpreté pour le rendre plus fumable… et s’il est interdit pour cela d’utiliser des arômes de fruits ou alimentaires, qu’à cela ne tienne, pour contourner la loi, n’a-t-on pas créés des mini-cigarillos, soit de fausses cigarettes parfumées ?
On lira avec intérêt Golden holocaust (University of California Presss, 2012) de l’historien des sciences Robert Proctor qui dévoile les « tobacco documents » (79 millions de pages, 50 ans de documentation !) saisis dans le cadre du procès Philipp Morris dans les années 90 : tout y est expliqué.
Oui, mais voilà, en contre-partie de quelques amendes éventuelles – ou de la simple menace de celles-ci –, il est sans doute plus lucratif de laisser les fabricants de tabac continuer de s’enrichir avec une clientèle captive, favoriser certains laboratoires pharmaceutiques qui sauront bien se montrer reconnaissant à l’occasion, et continuer d’encaisser les taxes sur le tabac…
À défaut de 50 milliards d’économie à trouver, il n’y a pas de vilains petits profits à continuer… au nom de la santé budgétaire, en tout cas !
11:09 Publié dans Philippe Randa | Lien permanent | Commentaires (0) | | Facebook | |
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