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mardi, 17 novembre 2015

APRES LA SANGLANTE TRAGÉDIE, L’INSUPPORTABLE COMÉDIE

Paris-13-novembre.jpgLa chronique de Philippe Randa

Un traducteur français avait imposé, dans la célèbre série des années 60 du siècle dernier Le Prisonnier, la phrase « Bonjour chez vous » comme apostrophe de « souhait par politesse »… Va-t-on voir de même l’apostrophe « bon courage » devenir l’usage à venir ?

C’est en effet la politesse dont a fait preuve ma boulangère ce matin. J’ai d’abord crû à de l’humour – je venais de lui acheter une baguette et un pain aux raisins – mais non, pas du tout…

Après m’être contenté pour ma part d’un aussi traditionnel que peu original « bonne journée », je la quittais en réalisant que j’avais effectivement entendu, ce lundi matin « post-sextuple attentats du vendredi 13 novembre dernier », un journaliste nous informer que les gens ne se disaient plus « bonne journée » comme à l’accoutumée, mais, donc, « Bon courage » !

Pourquoi « Bon courage » ?

Pour supporter, après deux jours de matraquage compassionnel, les informations diffusées par les médias ? Soit pas grand chose sur les réalités des commanditaires de l’attentat – quelques arrestations et beaucoup de blablas convenus – et énormément de témoignages de citoyens « anéantis », « bouleversés », « furieux », « vindicatifs », mais dans l’ensemble plutôt « effondrés » qu’un tel massacre ait pu avoir lieu… chez eux ! Chez nous ! En France, patrie auto-proclamée des droits-de-l’homme !

Et parmi tous ces témoignages, peu de proches ou de parents des victimes, ce qui serait compréhensible, non ! surtout, principalement, quasi-exclusivement des anonymes qui n’avaient rien à dire d’instructif, mais qui tenaient à le faire savoir pour les plus grands besoins des chaines d’informations qui occupent ainsi leur temps d’antenne à peu de frais, mais à grosses rentrées publicitaires, évènement oblige !

Suis-je donc un père insensible de n’avoir eu que le simple réflexe de joindre, sans trop d’appréhension, je l’avoue, mon fils aîné samedi matin pour m’assurer, tout de même ! qu’il n’était pas allé au Bataclan vendredi soir ? Cela aurait pu, puisqu’il apprécie tout particulièrement le guitariste du groupe qui s’y produisait…

Suis-je donc un père irresponsable pour ne pas même lui avoir demandé s’il était traumatisé par cette tuerie ? Et pour avoir simplement appris à mon fils cadet – qui dormait ce soir-là dans la chambre à côté de la mienne – ce qui s’était passé en concluant simplement, mais assez sentencieusement : « Ce sont de vrais morts, pas comme à la télé ou dans tes jeux vidéos… Comprends que la guerre, ça existe “pour de vrai ». Et pour tout le monde. Personne n’en est à l’abri. Jamais ! Depuis la nuit des temps ! »… et sans insister plus que cela afin qu’il évite d’en prendre prétexte pour rechigner d’aller à l’école ce lundi matin, arguant d’une prévention des risques de mise en danger d’écolier…

Suis-je donc un être infâme lorsque j’entends – mi-énervé, mi-effaré, mi-amusé (tout dépend de l’importance de chaque moitié, on sait cela) – cette institutrice témoigner avec des trémolos dans la voix qu’elle a réfléchit tout le week-end aux mots qu’elle allait dire à ses élèves ce lundi matin pour « leur en parler » ? Mots qu’elle ne trouvait pas, la pauvre femme ! Drame du vocabulaire, de l’intelligence ou du formatage politiquement correct, au choix… ou un peu tout ça, sans doute !

Suis-je enfin un monstre passible d’un quelconque pilori citoyen pour songer, au fond de moi : « Ah ! les cons ! » en entendant tous ceux qui se croient fins en martelant leur « Bon courage » compatissants toute cette journée du lundi 16 novembre, et encore le lendemain pour les plus acharnés ?

Peut-être que oui, je suis tout cela, mais avec quelques circonstances atténuantes, tout de même : je fais partie de cette poignée d’hérétiques qui n’ont eu de cesse, ces dernières décennies, de tenter d’avertir nos compatriotes que cela allait arriver. Quoi ? Le massacre de ce vendredi 13 novembre ! Après quelques autres, de moindre importance numérique, mais tout de même ! Ce n’était pas le premier.

Et vous savez quoi, plus probablement encore, pas le dernier !

Vous dormiez en paix, braves gens ? Les droits-de-l’homme veillaient ? Allez, bon courage à vous aussi… et sans rancune !

 

00:11 Publié dans Philippe Randa | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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