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mercredi, 09 juin 2021

LES RISQUES DU METIER

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Le bloc-notes de Jean-Claude Rolinat

Le président Macron, allant chasser l’électeur sur les terres dauphinoises, s’est pris une baffe sur le museau le mardi 8 juin. Tout le landerneau politique est en émoi, de la droite dite extrême, à la gauche du même calibre, de l’usurpatrice au charlatan islamophile, en passant par la droite courbe et fourbe. Ils sont venus, ils sont tous là sur le petit écran, à pleurnicher sur les valeurs de la République qui seraient bafouées, sur l’humiliation qu’à travers la personne du président, chaque Français serait sensé ressentir.

En giflant Emmanuel Macron, le bougre qui a cru bon, - d’après les médias -, de crier «  Montjoie Saint-Denis » comme devaient le hurler les chevaliers partant à l’assaut de l’infidèle en Terre sainte, aurait administré, symboliquement, une claque à chaque citoyen. Moi, je n’ai rien senti. La dernière gifle que j’ai reçue, c’était il y a des lustres, administrée par mon père, sans doute à juste raison !

Vous êtes bafoué vous, vous vous êtes senti  humilié ? Pas moi. Pourquoi ? On ne respecte que ce qui est respectable. Le chef suprême d’une nation doit être son incarnation, comme peut l’être par exemple, symboliquement, la Reine d’Angleterre. Or, un chef de l’État qui se fait complaisamment photographier avec une meute de musiciens dans des tenues et des attitudes provocantes au palais de l’Elysée à l’occasion de la fête de la musique, ou qui pose dans l’île de Saint-Martin avec deux Antillais hilares et moqueurs, sans oublier un étrange rendez-vous avec deux You tubeurs à la mode, toujours sous les ors de la République, tout cela n’inspire pas le respect dû à la fonction que le principal intéressé devrait se faire un devoir d’honorer au premier chef. Il désacralise le rôle du souverain, qu’il soit d’essence monarchique ou républicaine. Certes, la marge de manœuvre est parfois étroite. Mais, après tout, ceux qui sont élus à cette fonction suprême, l’ont choisie.

Mieux vaut une claque qu’une balle !

En aimant les bains de foules, en souhaitant être au contact avec le public, il est vrai qu’un président, un souverain, bref un chef d’État, s’expose à des risques et des dangers autrement plus graves qu’un entartrage ou qu’une « claque sur le baigneur ».

Si De Gaulle avait la « baraka », rappelons-nous des épisodes plus tragiques comme l’assassinat de l’Archiduc d’Autriche-Hongrie à Sarajevo en 1914, - prétexte à une boucherie sans nom -, celui de notre président Sadi-Carnot, ou le meurtre des rois du Portugal et de Yougoslavie au début du XXe siècle, sans oublier celui de mesdames Gandhi ou Bénazir Buttho. La liste est longue comme un annuaire téléphonique d’hier et de jadis, d’hommes publics, célèbres ou inconnus, à être tombés sous le feu d’un pistolet ou le tranchant d’une lame. La politique n’est pas un métier de tout repos, ce n’est pas « un long fleuve tranquille ».

Autrefois, pour un soufflet, on exigeait réparation par un duel, ou on faisait débarquer à Alger un  contingent de soldats, comme l’ordonna le roi de France Charles X, pour punir le Dey d’avoir giflé notre consul. Autres temps, autres mœurs. Heureusement, notre président est en vie, il est indemne, tout fringuant, peut-être un peu « tourneboulé » par cette regrettable mais, peut-être, salutaire expérience. Je crois que Kennedy aurait bien aimé recevoir une gifle plutôt qu’une balle, un certain 22 novembre 1963 à Dallas, Texas ! Relativisons.

21:54 Publié dans Le bloc-notes de Jean-Claude Rolinat | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

Crise du Covid et aggravation de la pauvreté

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Arnaud Raffard de Brienne

Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), émanation de l’ONU spécialisée dans les questions liées au monde du travail et à l’emploi, la crise sanitaire en cours serait à l’origine d’une augmentation de 100 millions du nombre de travailleurs pauvres recensés dans le monde mais aussi de la perte de 75 millions d’emplois en 2021 et autour de 23 millions en 2022.

En France, selon les derniers indicateurs de l’INSEE, la pauvreté connait aussi une forte aggravation. Que l’épidémie de Covid ait joué un rôle d’amplificateur dans la paupérisation de la population la plus précaire et la plus démunie, personne ne songerait à le contester mais impossible d’occulter le fait qu’en 2019, l’année précédant la crise que nous vivons, 9,1 millions de nos concitoyens percevaient déjà une rémunération inférieure à 1 070 euros nets par mois, le seuil de pauvreté en vigueur. Parmi ceux-ci, 5,3 millions devaient se contenter de ressources inférieures à 885 euros dont 12% parmi les 18-29 ans  (8,2% en 2002). L’arrêté des statistiques pour 2021 devrait révéler un nombre de pauvres compris entre dix et onze millions de Français. Triste record national, l’analyse révèle que nos jeunes concitoyens de 18-24 ans figurent parmi les plus pauvres comparativement à de nombreux autres pays européens. La situation ne s’avère guère plus brillante pour les actifs de 25 à 34 ans, tranche d’âge des actifs les plus impactés selon l’INSEE, dont un tiers accuse une baisse de revenu au minimum égale à 50 euros. 

Autre indicateur donnant à réfléchir, 81% des personnes en situation de grande pauvreté ne peuvent s’offrir de vêtements neufs et, pire encore, elles sont 90% incapables de s’offrir la moindre semaine de vacances, même dans les conditions les plus modestes qui soient.

Il est vrai que le nombre de bénéficiaires des minimas sociaux n’avait pas attendu la crise et les confinements pour progresser inexorablement d’année en année. Fin 2020, plus de deux millions de foyers percevaient le Revenu de solidarité active (RSA), soit 143 000 bénéficiaires de plus qu’en 2019, un peu plus de l’équivalent du nombre d’habitants d’une ville comme Aix-en-Provence. Plus 6,1% d’ayant-droit à l’allocation de solidarité spécifique (ASS) et +2,5%d’aides au logement. Sans oublier une augmentation de 48% des aides d’urgence du Crous aux étudiants, par rapport à 2019.

Le poids des départements d’outre-mer

Bien que la situation soit globalement des plus inquiétantes, il serait déloyal de ne pas s’attarder un instant sur le poids relatif des départements d’outre-mer dans ces statistiques sur la progression de la pauvreté. Si ceux-ci – Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion - représentent 14% du total de nos concitoyens les plus pauvres, Mayotte à elle seule compte pour 10% avec les trois-quarts de sa population vivant, malgré les aides sociales massives, sous le seuil de 50% du revenu national.

On comprend aujourd’hui l’enthousiasme des Mahorais votant à 95,2% leur accession au rang de 101ème département français lors du référendum de 2009, offrant à Nicolas Sarkozy un triomphe facile lorsqu’il lançait superbement « Mayotte c’est la France » à une foule enthousiaste rassemblée sur l’esplanade du marché de Mamoudzou. Très chère Mayotte…

Quoiqu’il en soit, les Français d’ici ou d’ailleurs paient certes au prix fort la crise sanitaire et sa gestion chaotique qui ne constituent cependant que l’accélérateur d’une situation qui ne cessait déjà de se dégrader bien avant la crise actuelle. Les publications de l’INSEE l’automne prochain devraient fournir un aperçu édifiant sur l’ampleur des déprédations économiques et sociales.

Article publié dans le quotidien Présent d'aujourd'hui cliquez là

21:42 Publié dans Arnaud Raffard de Brienne | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

Miscellanées

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Le billet de Patrick Parment

L’affaire Mélenchon relève de la tempête dans un verre d’eau. Pour la bonne raison que ce personnage qui a suscité, un temps, une juste curiosité a fini par endosser le costume du clown et saborder son parti accentuant d’autant la fragmentation d’une gauche dont les rêves sont venus se fracasser sur le principe de réalité. Certes, me direz-vus la débandade vaut aussi pour ces Républicains, résidus anachroniques d’un RPR réduit à l’impuissance par la bêtise d’un Chirac, d’une UMP, union chiraco-centriste, destinée à sauver les meubles pour finir en Bérézina républicaine. Quant à la République en marche, parti sans vraie colonne vertébrale, elle est condamnée à naviguer à vue entre ces différents courants qui agitent la classe politique française. D’où le côté désabusé des Français que confirment les taux élevés d’abstention. Aux dernières législatives partielles, le taux de votants n’a pas dépassé 19%. Bonjour la démocratie.

Allemagne/France

La situation politique allemande n’est guère plus brillante si on la considère à l’aune des perspectives européennes. Le bilan d’Angela Merkel est une catastrophe qui laisse un paysage politique en plein doute. Le possible successeur de Merkel, à la tête de la CDU/CSU est un fort triste sire, Armin Laschet, dont on imagine mal le voir sortir du sillon tracé par la mère Merkel. Une affaire à suivre. Mais ce qui agite la classe politique allemande en ce moment, c’est la déclaration du Conseil scientifique indépendant du ministère de l’Economie qui prône un départ à la retraite à 68 ans et de coupler ce dernier avec l’évolution de l’espérance de vie.

Si la situation démographique allemande est une catastrophe, en France cela ne va guère mieux dans la mesure où le taux de fécondité des Gaulois est biaisé par celui des immigrés. On ne sait si la situation est identique en Allemagne comme en France. Toujours est-il qu’officieusement, en France, on vous engage à partir à la retraite à 65 ans, quand bien même si le seuil légal est fixé à 62 pour les personnes nées à partir de 1955. Le gros du scandale n’est pas l’âge du départ à la retraite, mais bien que nombre d’entreprises virent leur personnel dès la cinquantaine venue. Et c’est l’Etat qui comble le trou de ces préretraites forcées, c’est-à-dire la communauté nationale.

On a toujours milité pour que l’on fixe un taux d’années travaillées plancher et que l’on laisse libre la personne de prendre sa retraite ou de prolonger son activité. Il est bien évident qu’il y a de grandes différences entre les métiers manuels pénibles et les autres. Revers de notre modernité : faut-il compter au rang de pénible, la pression psychologique – voir le harcèlement -, qu’exerce de grands groupes sur leurs personnels comme on a pu le constater chez Orange et ailleurs ?

Italie

La situation politique en Italie… est italienne. A la différence que de se proclamer fasciste n’est pas à proprement parler une insulte. Heureux pays. Et l’extrême-droite italienne, appelons-là comme cela, ne cesse de faire évoluer ses frontières et d’élargir son audience. C’est ainsi qu’hier encore Matteo Salvini, porté aux nues par toute la droite italienne, a largement mis de l’eau dans son vin quand ce dernier a commencé à respirer les premières effluves du pouvoir. Dans un pays où la démocratie chrétienne tient le haut du pavé, l’accession au pouvoir se joue avec l’assentiment ou la neutralité d’un centre pour le moins mouvant. Pour l’heure, et là est la grande surprise, La ligue populiste de Matteo Salvini est en train de se faire tailler des croupières par les post-fascistes de Fratelli d’Italia de la très dynamique Giorgia Meloni. Or, Salvini avait misé sur une coalition qui regrouperait toutes les droites. Outre ceux déjà cités il faut ajouter à cette coalition Forzia Italia de Silvio Berlusconi, en perte de vitesse à l’image de son leader, 84 ans, à la santé plus que déclinante. Mais près d’un Italien sur deux accordait sa confiance à cette coalition. En attendant, Giorgia Meloni, 44 ans, est au coude à coude avec la Ligue et ne désespère pas de devenir la première femme présidente du Conseil. Et croyez-moi, cette femme c’est autre chose que cette eau tiédasse de Marine Le Pen.

12:16 Publié dans Le Billet de Patrick Parment | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

Quand la gauche veut délimiter le périmètre de la pensée

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Eugénie Bastié

« Il ne peut pas y avoir d e pensée de droite » : tel est. Le constat sans appel du sociologue de gauche radicale Geoffroy de Lagasnerie. Sa justification donnée lors d’une interview au podcast « Dialogues » est des plus étonnantes : « Car si vous regardez la société, si vous vous mettez simplement à l’étudier, vous voyez nécessairement des phénomènes qui vont devoir être pensés comme de domination : des migrants qui se noient, des groupes capitalistes, le féminicide, les femmes battues, l’homophobie, la surreprésentation manifeste des Noirs et des Arabes dans l’appareil carcéral. » Passons le fait que, lorsqu’on est de gauche, on a le droit de faire de tels constats ethniques immanquablement jugés « racistes » s’ils émanent d’un homme de droite. Passons aussi sur le fait qu’il existe un « réel » qui n’est pas celui de la domination, mais celui de l’ensauvagement, que Lagasnerie ne semble pas voir et qui donne lieu à d’autres conclusions. « Je ne dis pas que la droite ne peut pas articuler des mots avec sa bouche, qu’elle ne peut pas former des traits qui formeront des lettres avec sa main », dit, grand seigneur, le petit marquis de l’intersectionnalité. Sans surestimer l’influence de Lagasnerie, cette sortie n’en est pas moins révélatrice de l’arrogance d’une gauche intellectuelle persuadée de détenir le monopole du Vrai et du Bien.

Il y a soixante-cinq ans, Simone de Beauvoir disait peu ou prou la même chose dans son opuscule Faut-il brûler Sade ? La pensée de droite aujourd’hui où elle analysait sur 300 pages les écrits des intellectuels de droite (de Barrès à Montherlant, en passant par Aron) pour conclure : « La bourgeoisie existe encore : mais sa pensée, catastrophique et vide, n’est plus qu’une contre-pensée. » « La vérité est une, l’erreur, multiple. Ce n’est pas un hasard si la droite professe le pluralisme », écrivait-elle en exergue de cet ouvrage, signifiant par là que seule la gauche pouvait se targuer d’une pensée cohérente et construite. Pour Beauvoir, la droite n’a pas d’idées, seulement des intérêts, ceux de la bourgeoisie, qu’elle maquille sous des valeurs incohérentes entre elles. Il est vrai que si on résume la « pensée » à un système idéologique ou à un programme de transformation du monde, la droite ne pense pas, mais en ce cas, il faut jeter, de Sénèque à Pascal en passant par Montaigne, tous les penseurs qui n’ont pas « produit des concepts » ni ambitionné la révolution, mais simplement analysé leur époque ou sondé les tréfonds de l’âme humaine.

À gauche, la disqualification intellectuelle s’accompagne bien souvent d’une délégitimation morale : être de droite, ce n’est pas seulement être bête et incompétent, c’est aussi être aussi égoïste et méchant. « Sartre était un moraliste. Il ne pouvait pas admettre que mes prises de position, peut-être erronées, ne fussent pas coupables », écrivait déjà Aron. L’acteur Jean-Pierre Darroussin a repris cette antienne dans l’émission « C politique », sur France 5, le week-end dernier : « Je pense que c’est plus facile d’être de droite que d’être de gauche », a-t-il déclaré, récitant du Luchini dans le texte, mais sans second degré. « C’est plus compliqué de résoudre les problèmes d’injustice que les problèmes d’ordre », ajoutait-il. On pourrait d’ailleurs dire exactement le contraire : professer
la vertu confère des avantages en termes de prestige social, et dans un dîner en ville ou sur une radio du service public, il est assurément plus difficile d’assumer d’être de droite que de se dire féministe et écolo. Et à l’heure où pleuvent les millions de plans de relance, il semble plus simple de colmater les inégalités que de restaurer la civilisation.

« La Gauche ? Le Bien, résumait Jean Cau dans ses Croquis de mémoire. Je regardais M. Mauroy, premier ministre, prononcer le mot de “Droite”. La joue s’enfle, le regard se durcit, la poitrine se gonfle d’un air mauvais qu’expulse une bouche dégoûtée. Il dit, en vérité, Satan, le Diable, le Mal, l’Informe, Léviathan, Belzébuth, Melmoth, Baal, il dit l’Inhumain et l’Incompréhensible. C’est exactement cela : l’incompréhensible. Comment la Droite ose-t-elle et peut-elle exister ? » Pourtant, la droite existe, et, même si elle est parfois tentée de se réduire elle-même à un simple économicisme, une simple gestion des affaires courantes, elle pense. Depuis Chateaubriand jusqu’à Raymond Aron en passant par Tocqueville, Burke et de Maistre, Carl Schmitt et Soljenitsyne, elle a ses penseurs dont la pluralité et l’effervescence ne sont pas un signe d’incohérence, mais de refus de l’esprit de système et d’un rejet de l’abstraction.

Plutôt que d’appréhender la vie intellectuelle comme un combat binaire entre méchants et gentils ou un affrontement d’intérêts, il faut la considérer comme un déchirement permanent autour de la hiérarchie des valeurs (faut-il privilégier l’égalité ou la liberté ? l’efficacité ou la justice ?), un conflit d’imaginaires (celui de la Perte pour la droite, de la Promesse pour la gauche), une conversation dont personne ne détient entièrement le mot final.

Source : Le Figaro 09/06/2021

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