samedi, 06 avril 2024
La France harcelée
Vincent Trémolet de Villers
C’est la même société qui vote des lois sur la discrimination capillaire dans l’entreprise et laisse une jeune fille se faire battre à mort devant son école. Le même microcosme qui surveille, collecte, signale les « violences symboliques », tandis qu’explose sur le trottoir une sauvagerie de temps barbares. Le même pouvoir qui promeut les cours d’empathie et assiste désemparé au départ d’un proviseur menacé de mort parce qu’il a dit à une lycéenne de retirer son voile, au lynchage d’un jeune élève. Samara, nouvelle victime d’une litanie insoutenable de crimes où s’étreignent l’inhumanité et l’impunité, nouveau drame d’un grand renversement qui donne la primauté à la force sur le droit, à la cruauté sur la civilité, à la meute sur l’autorité. Si l’on en croit sa mère, l’islamisme, dans cette histoire, mêle son poison au ricanement, au harcèlement, aux pulsions noires de l’adolescence. L’enquête nous dira ce qu’il en est, mais il n’est malheureusement pas besoin d’attendre pour faire clignoter tous les signaux d’alarme. C’est la France entière qui se sent harcelée par la violence ordinaire. L’école, qui devrait être le sanctuaire de la transmission, le temple de l’instruction, le refuge de l’émancipation, est frappée en plein cœur par une entreprise de décivilisation ivre de son pouvoir.
Entendons-nous : en chaque homme, « ce nœud complexe d’appétits violents » (Saint-Exupéry), existe une part de férocité irréductible, mais le génie d’une société est de surmonter cette sauvagerie par le savant mélange de l’autorité intangible, de la maîtrise des pulsions et de l’élévation des sentiments. En déifiant l’individu, nous avons atomisé les piliers de l’autorité (ni maître ni père) ; en nous acharnant contre notre passé, nous avons méthodiquement déconstruit les murs porteurs d’une société (frontières, famille, culture, coutumes). Reste le chaos, tempéré par une élite de professeurs, de policiers, d’infirmières, de parents qui, dans la tempête, tiennent ce qu’ils peuvent.
Le pouvoir, lui, commente et se noie dans un océan de mots, quand tout le pays attend une discipline démocratique capable, sans trembler, de protéger nos libertés élémentaires et la vie de nos enfants.
Source : Le Figaro 05/04/2024
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