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mercredi, 16 juillet 2025

Portrait du progressiste

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La libre chronique de Charles-Henri d’Elloy

Il y a toujours des crétins pour croire au sens de l’histoire, comme il y a des prétentieux qui s’auto-proclament "progressistes" ; mais qu’est-ce qu’un progressiste ? 

L’âge a ceci d’avantageux qu’il donne, sur la durée, une idée assez juste de la nature humaine. J’ai rencontré beaucoup d’hommes se prétendant "progressistes" et j’ai noté certains traits remarquables qu’ils avaient en commun. La liste n’est pas exhaustive…

Les progressistes sont persuadés que le changement est un bien en soi, sans jamais se préoccuper des inconvénients à moyen et long terme. Ils demeurent aveugles quant aux dommages engendrés par un changement. Ils vénèrent la nouveauté, surtout si elle vient de l’étranger. Ils n’ont pas un esprit critique très développé sur leur époque. En revanche, ils ont un jugement acéré sur le passé, parfois sur de lointaines périodes qu’ils dénigrent allègrement sans se poser la question de la pertinence d’un jugement moral porté sur les comportements d’humains ayant vécu il y a plusieurs siècles. Les progressistes sont très doués pour être dans le bon camp de l’histoire, une fois que celle-ci est écrite.

Ce que les progressistes appellent "progrès" n’est, bien souvent, qu’une perméabilité aux propagandes efficaces du système. Ils ont un côté très sentencieux car ils sont persuadés de détenir la vérité. Cela en fait des absolutistes pour eux-mêmes, mais des relativistes pour les autres.

Lorsque j’affronte l’un d’entre eux, à un moment ou à un autre, il me dit toujours : « Il faut bien faire avancer l’histoire… ». Ah oui ? Et qu’est-ce que cela signifie de faire avancer l’Histoire ? C’est à croire que tous les progressistes sont dotés de super pouvoirs pour faire avancer le temps ? Et pourquoi avancer le temps ? Pour aller plus rapidement au cimetière ?

J’aimerais trouver un philosophe qui me donne une définition du progrès. Attention, j’ai bien dit un philosophe et non pas un professeur de philosophie qui se prend pour un philosophe ! J’en connais des professeurs qui professent, mais lorsqu’il faut passer aux travaux pratiques, c’est une autre histoire…

Je vais vous raconter une anecdote qui décrit bien ce qu’est un progressiste. Quelques jours avant le conclave, Donald Trump a publié, sur un réseau social, une photo où il est représenté en pape. Évidemment, c’était un montage fabriqué pour faire sourire et montrer, par auto-dérision, son intérêt pour la papauté et l’importance des enjeux du prochain pontificat. La blague a fait rire jusqu’au Vatican ; mais Donald Trump incarnant le mal absolu pour les progressistes, ces derniers lui sont tombés dessus pour l’accuser de blasphème grotesque et vulgaire. J’ai ferraillé avec un progressiste auto-proclamé se déclarant "offusqué" par cette photo. Pauvre homme fragile ! Je pense qu’il est très soucieux par ailleurs de l’image de l’Église catholique et qu’il est choqué par certaines unes de Charlie hebdo, le journal des progressistes qui pensent avoir de l’humour ! Il est cocasse de constater que le blasphème est convoqué à la rescousse, par un progressiste, pour condamner un comportement qui relève au pire de la potacherie. Ces mêmes progressistes se disent par ailleurs grands défenseurs de la liberté d’expression…

L’avortement, le mariage entre homosexuels, l’euthanasie, ça passe crème, mais une photo de Donald Trump en pape, pensez-donc ! C’est une atteinte à la dignité humaine ! Une offense aux droits de l’homme, aux droits de la femme et une insulte à la République ! Une désinvolture flagrante envers la laïcité et une incitation à la haine à l’encontre de tous les croyants ! C’est légèrement surjoué, mais c’est le ton employé par ces "hommes de progrès". Plus rien ne m'étonne de la part des "progressistes".

Chez le progressiste, c’est le centriste qui remporte la palme du dédain. Il se remarque au plus jeune âge. Il n’a pas de jeunesse. Il se prend au sérieux dès l’âge de raison et se débrouille toujours pour plaire à ses maîtres ou plutôt pour s’adapter à leurs exigences. À trente ans, il est déjà chauve ; à quarante, il en paraît soixante. Il faut dire qu’il est tellement en avance sur son temps qu’il vieillit plus vite que la moyenne. Eh oui, être progressiste, ça fait vieillir plus vite, on n’y pense pas assez ! À force de se projeter dans l’avenir, on finit dans sa tombe, comme tout le monde. Pas toujours, allez-vous me dire…  En effet, un progressiste se fait souvent incinérer, au mépris de tout respect pour le corps.

Le progressiste centriste est généralement doué pour les études, ce qui lui permet d’acquérir une solide fatuité. Sa suffisance s’en trouve confortée, elle ne le quittera plus. Naturellement, il lit Le Monde. Toujours du côté du manche, le progressiste centriste méprise le sans-grade, mais pas ouvertement, toujours de façon cauteleuse, parce qu’il est lâche. Lorsqu’il arrive à cinquante ans, avec la gueule d’Alain Juppé, le progressiste centriste est en mesure de donner toute sa nuisance.

Agelaste pincé, pisse-froid et peine-à-jouir, larbin servile du système, répéteur de la propagande officielle, le progressiste centriste est comme une anguille molle et gluante glissant sur sa bave pour atteindre le cénacle des arrivistes. Il est toujours à la page, toujours dans le vent, toujours en mouvement, mais lorsqu’il parle politique, c’est un filet d’eau tiède d’un ennui mortel.

Sycophante 24 heures sur 24, il n’a pas hésité, avec un zèle inégalé, à dénoncer les réfractaires au masque et au vaccin durant la grande mascarade covidique.

Incapable d’autodérision, le progressiste centriste surjoue l’homme offensé si vous brocardez ce qu’il a de plus précieux : sa sainte certitude en lui-même. Il est d’une bégueulerie de surveillante de couvent ; mais comme il est lâche, ses capucinades ne viseront jamais ce qui est à la mode car il craindrait trop de déplaire.

Le progressiste centriste n’est pas forcément méchant. Il est simplement persuadé d’être investi d’une mission sacrée : celle d’éclairer le monde de ses lumières éblouissantes mais délusoires. Il ne faut pas en vouloir au progressiste centriste. Il est le fruit d’un système qui fait croire aux naïfs que les hiérarques d’aujourd’hui feront forcément mieux qu’hier - toujours à cause du fameux sens de l’histoire -, mais, il n’a pas compris que si les époques changent les circonstances, le temps, lui, ne change pas la nature humaine. La barbarie organisée n’appartient pas qu’au passé, hélas. Elle prend d’autres formes et s’opère de façon feutrée. Oui, la cruauté n’a pas d’âge. Il suffit de suivre l’actualité mondiale qui chaque jour nous donne à voir le triste spectacle de la plus effroyable sauvagerie !

Le progressiste n’a cure du passé ; il est forcément tourné vers l’avenir. C’est original d’être "tourné vers l’avenir"… À part moi, je ne connais pas grand monde affirmant être tourné vers le passé. D’ailleurs, le progressiste se croit plus malin que les autres en vaticinant constamment.

À bout d’argument, le progressiste centriste avec qui j’ai ferraillé a fini par me traiter de « Dandy réactionnaire ». C’est un beau compliment ! J’aime beaucoup les dandys, mais il y a autant de définitions du dandysme qu’il y a de dandys. Si être un dandy, c’est se moquer du qu’en-dira-t-on, ne pas prendre la société au sérieux, alors oui, je suis volontiers un dandy ; et pour ce qui est d’être réactionnaire, je veux bien l’être aussi, car je considère que la réaction c’est la vie ! Il n’y a que les morts qui ne réagissent à rien.

En vérité, j’ai du mal à m’adapter au changement parce que depuis tout jeune, j’ai constaté que les changements n’apportaient pas forcément un progrès. En fait, à chaque fois que l’on m’a promis du mieux, c’était moins bien après ! Il y a un mot pour désigner les personnes comme moi : "Misonéiste". Je suis un misonéiste.

J’espère que cette chronique, même si vous ne l’avez pas aimée, vous aura été utile en vous permettant au moins de découvrir ce mot - si vous ne le connaissiez pas - et, ainsi, d’enrichir votre vocabulaire…

Chronique publiée dans le n°70 (été 2025) de la revue Synthèse nationale cliquez ici

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15:05 Publié dans Charles-Henri d'Elloy | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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