vendredi, 25 janvier 2013
2011, 2012, 2013… LE MARTYRE DE LA SYRIE SE POURSUIT...
Michel Dantan
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Les russes sont plus que jamais convaincus que le départ du Président syrien n’est pas la solution au conflit qui ensanglante son pays. La nouvelle donne qui semble devoir s’installer durablement sur la scène syrienne apporte chaque jour un peu plus de crédit à leurs analyses de départ et à contrario invalide celles émises par les chancelleries occidentales qui ne faisaient en réalité que spéculer sur la chute du régime baasiste. Le vice Ministre russe des Affaires étrangères, Mikhaïl Bogdanov a résumé la situation qui prévalait actuellement en Syrie en jugeant improbable toute victoire des opposants au régime syrien : « au début certains pronostics parlaient de deux, trois, quatre mois, maintenant le conflit dure depuis prés de deux ans. La situation peut évoluer de différentes façons. Je pense que le conflit risque de traîner en longueur » a diagnostiqué le vice Ministre. Des propos qui faisaient échos à ceux du Ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, qui estimait déjà le 13 janvier que l’éviction du président syrien du pouvoir « était impossible à mettre en œuvre ».
Une révolution dévoyée qui débouche sur l’esclavage sexuel des femmes.
Plusieurs éléments tirés des évolutions qui sur le terrain se sont fait jour depuis quelques mois peuvent effectivement conforter le ministre russe dans son analyse. La multiplication des attentats à la voiture piégée où le recours à des tirs aveugles de roquettes sur des bâtiments civils, peuvent s’interpréter comme autant de punitions infligées à une population qui refuse de rallier une cause qui ne répond plus à ses aspirations, mais aussi comme l’incapacité des jihadistes à modifier sur le terrain un rapport de force qui s’avère désormais favorable aux troupes du régime. Les communiqués de victoire périodiquement envoyés de Londres et complaisamment relayés par des médias qui jusqu’à présent se sont obstinés à prendre leurs désirs pour des réalités ont quasiment tous été démentis par les faits. L’armée syrienne ne s’est pas débandée, pas plus que l’ASL n’a recruté des bataillons de jeunes volontaires dans les camps de réfugiés répartis en Turquie, en Jordanie ou au Liban. Les dissensions entre factions islamistes rivales quant à l’interprétation de la charia, notamment concernant le sort qu’il convient de réserver aux épouses et aux jeunes filles appartenant aux familles favorables au régime ou à des familles qui refusent d’apporter leur soutient à la cause défendue par les islamistes, jette une ombre de plus en plus sombre, c’est le moins qu’on puisse dire, sur le caractère démocratique de cette révolution dite syrienne. Une révolution qui débouche sur l’esclavage sexuel de femmes considérées comme des prises de guerre au nom de la religion, c’est sans doute une surprise à laquelle beaucoup ne s’attendaient pas.
Les USA pris dans leurs contradictions.
Que l’Elysée ne s’en émeuve pas et continue mordicus à entretenir le mythe d’une révolution qui se ferait au nom des libertés et des droits de l’Homme, n’empêche pas l’administration américaine de commencer à réfléchir aux conséquences déstabilisatrices pour la région que pourrait entraîner une victoire militaire des islamistes en Syrie. L’éclatement de la Syrie en plusieurs entités ethniques et religieuse, oui, et c’était sans doute leur intention de départ, le chaos incontrôlable à l’irakienne à l’arrivée, peut-être pas. Les USA qui ne sont pas à une révision près de leurs choix stratégiques en matière de politique extérieure lorsque la perspective de l’échec s’annonce inéluctable préféreraient sans doute ne pas accélérer le processus de désintégration de la Syrie dans lequel ils se trouvaient engagés si à terme celui-ci devait se révéler contre productif pour leurs intérêts. D’où leur refus de doter l’ASL d’armes susceptibles de neutraliser l’aviation syrienne ne sachant pas dans quelles mains elles risquent de tomber. Quant au spectre d’un génocide planant sur les minorités chrétiennes, alaouites, druzes et kurdes, il semblerait aussi qu’après avoir décillé quelques yeux, cette perspective soit prise au sérieux et ne finisse par entamer le capital de sympathie que l’opposition inspirait encore il y a peu à ses protecteurs.
Les jihadistes à la manœuvre.
La confiscation sur le terrain de la quasi-totalité de la lutte armée par l’organisation terroriste d’al-Nosra, qui au demeurant apparaît bien comme une résurgence en Syrie des bandes armées islamistes que les américains avaient mis sur pied en Lybie pour abattre le régime du colonel Kadhafi, passe de plus en plus mal auprès de certaines chancelleries qui redoutent d’avoir à jouer un jour le rôle de pompiers pyromanes pour éviter qu’un embrasement ne se répande dans toute la région. L’opinion non plus ne s’y retrouve plus dans ce jeu de massacres et ne comprend pas qu’il puisse y avoir de bons islamistes en Syrie, mais de mauvais au Mali, alors que les uns et les autres se réclament de la même idéologie et commettent les mêmes crimes au nom du même dieu. La France se trouve là directement concernée. L’Egypte qui s’est rapprochée récemment de Damas, quitte à s’éloigner de l’axe tordu qui de Doha à Washington passe par Ankara, Paris, Londres et à fissurer ainsi le mur de l’intransigeance dressé autour de la capitale syrienne, prouve que la question syrienne ne fait pas l’unanimité parmi les capitales arabes. Quant à la Turquie, dont la frontière protège les bases arrières des jihadistes recrutés grâce à l’argent des pétro dollars dans les viviers que constituent les immenses bidonvilles qui ceinturent les grandes capitales du monde musulman, son Président Erdogan pourrait bien demain avoir des comptes à rendre lorsque de retour dans leurs pays d’origine, certains de ces volontaires de l’internationale islamiste, seront recrutés pour venir poser leurs bombes en Europe. Le terrain d’entraînement au jihad que constitue aujourd’hui la Syrie, n’est pas sans rappeler, pour autant que l’on accepte de garder les yeux ouverts, le rôle formateur que jouèrent en leur temps l’Afghanistan et la Bosnie pour les futurs auteurs des attentats de New York, Madrid et Londres, pour ne parler que des plus spectaculaires. Côté communautés, des milices kurdes se sont formées pour assurer la protection de la leur et en décousent déjà avec les islamistes leur infligeant de lourdes pertes, preuve s’il en est que les minorités ne sont pas disposées à se laisser découper en morceaux par les protégés du Qatar et ses alliés. Les vautours du Nouvel ordre Mondial qui espéraient que les jihadistes viendraient rapidement à bout de la résistance syrienne risquent d’en être pour leur frais, tout au moins pour un bon bout de temps, la réalité semblant en tout cas donner raison aux prévisions russes.
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