dimanche, 21 février 2021
Premières craintes d’inflation et d’augmentation des taux d’intérêt
L’indice CAC 40 a progressé de 1,23 %, au terme d’une semaine où ont ressurgi les inquiétudes liées à un grand retour de l’inflation dans les pays développés. Le Dow Jones a grappillé 0,11 %, mais le Nasdaq et le S&P 500 ont baissé respectivement de 1,5 % et 0,71 %. Les investisseurs apprécient les politiques monétaires laxistes pour tenter de raviver l’inflation et la croissance dans un monde déflationniste, mais beaucoup moins les risques réels d’inflation et de hausse des taux d’intérêt obligataires, ce qui les rend nerveux. Les banques centrales se montrent toujours accommodantes, mais leur position pourrait rapidement apparaître intenable ; elles pourraient être amenées à changer, plus rapidement que prévu, de braquet et de politique monétaire.
Le Bitcoin, canari dans la mine de la folie humaine, a dépassé les 50.000 dollars, galvanisé par Tesla, les grandes banques et tous les spéculateurs avides de la planète. 32 % des 18-24 ans affirment avoir déjà investi dans le Bitcoin ou envisagent de le faire. Le marché du Bitcoin dépasse maintenant les 1.000 milliards de dollars, ce qui est toujours infime par rapport au marché de l’or. Suite à des achats irrationnels, depuis le début de l’année, son prix a grimpé de 89 %, dans l’attente d’une nouvelle explosion de la bulle et d’une interdiction totale par les banques centrales, comme en Inde.
Alors que nous vivons depuis quelques mois dans un monde déflationniste (-0,3 % pour les prix en novembre et décembre 2020), les Français ont amassé 225 milliards en billets sous les matelas, ce qui correspond à une peur de l’effondrement du système bancaire, et 470,1 milliards sur les dépôts en banque à vue. La peur de l’inflation, suite au plan Biden de 1.900 milliards de dollars, commence aussi à s’emparer des esprits. L’économiste français Olivier Blanchard, établi aux Etats-Unis, craint que l’inflation ne conduise à une augmentation subite des taux d’intérêt par la Réserve Fédérale, d’où les risques d’un krach obligataire. Les prix des céréales ont déjà bondi sur les marchés internationaux : maïs +45 %, soja +56 %, blé +11 %. Suite à la pénurie de conteneurs, les prix du transport maritime se sont envolés, de même que ceux de l’acier en raison d’un déséquilibre entre l’offre et la demande (600 euros la tonne, soit +245 % depuis novembre 2020). Les prix des billets d’avion, des vêtements et des hôtels ont tous été touchés en 2020, au plus profond de la pandémie ; ils sont susceptibles de rebondir brusquement, à mesure que l’économie redémarre.
Biden, la nouvelle secrétaire au Trésor Janet Yellen et la Réserve fédérale américaine (Fed), contrairement à l’ancien secrétaire au Trésor et haut conseiller Lawrence Summers, ne craignent pas le retour de l’inflation des années 1970. Pour vaincre l’inflation, selon le New York Times, il avait fallu à l’époque augmenter fortement les taux d’intérêt, avec les risques de récession, et supprimer l’indexation des salaires. Or, l’inflation est le seul moyen de réduire le stock des dettes, d’où le dilemme cornélien entre deux écoles : ceux qui craignent la surchauffe économique, une nouvelle inflation et demandent à Biden de réduire ses plans d’aide économique, et ceux qui préfèrent ignorer les risques d’inflation, poursuivre la politique actuelle de la fuite en avant, en pensant avant tout au chômage et à la dette impossible à rembourser.
C’est la raison pour laquelle la Fed a assuré mercredi qu’elle maintiendrait ses taux très bas pour soutenir l’économie jusqu’au retour du plein emploi et continuerait à inonder les marchés de liquidités via des rachats d’actifs mensuels à hauteur de 120 milliards de dollars. Craignant la surchauffe, des investisseurs ont vendu leurs bons du trésor à 10 ans et les taux sont restés fébriles pour s’installer nominalement à 1,3 % tandis que, compte tenu de l’inflation, le taux réel sur les bons du Trésor à 5 ans continuait de baisser à -1,88 %.
À partir d’un taux à 1,5 % sur les marchés obligataires, un plus grand nombre d’investisseurs vendront leurs actions pour acheter des obligations, d’où des risques de krach à venir aussi bien sur les obligations (effet mécanique sur les cours des anciennes obligations suite à la hausse des taux d’intérêt) que sur les actions (vente des actions et diminution des profits des entreprises) dans les mois qui viennent, si les taux d’intérêt montent.
15:59 Publié dans Tribunes de Marc Rousset | Lien permanent | Commentaires (0) | |
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Ces dingueries produites par le conformisme
Ivan Rioufol
Dans la France somnambule, la bêtise gambade. À côté de l’ordre sanitaire qui rêve d’un monde sous cloche, le politiquement correct multiplie ses dingueries. Vendredi dernier, le défenseur des droits, Claire Hédon, proposait d’expérimenter des lieux sans contrôles policiers, afin de ne pas « discriminer » les cités sensibles : une manière de pérenniser des zones de non-droit. Le même jour, France Culture saluait l’initiative d’un centre de théâtre invitant des jeunes «auteurs et autrices» à réécrire cinq pièces de Molière «afin de le rendre plus accessible» et de le «désacraliser». Le 21 janvier, sur France Culture, un anthropologue liait Babar, l’éléphant de Brunhoff, à une «apologie du colonialisme ». Dans Le Figaro du 6 février, Alain Duault dénonçait la réécriture simplifiée du Club des cinq, et l’initiative de Disney d’interdire aux enfants Les Aristochats, La Belle et le Clochard et Peter Pan, pour cause de « clichés racistes ». À qui le tour ?
Dans cette grande débandade face aux minorités tyranniques, le gouvernement hésite sur l’ampleur à donnerau bicentenaire de la mort de Napoléon, le 5 mai 1821, contesté pour avoir rétabli l’esclavage dans les colonies. Le pouvoir n’arrive pas davantage à s’opposer à l’usage de la repoussante « écriture inclusive » et son « point médian » (é·e) en usage dans l’enseignement supérieur, jusqu’au CNRS. À l’université Paris- Nanterre, une chargée de mission « égalité femmes-hommes et non- discrimination » a pour objectif de généraliser cette grammaire idéologique, destinée à lutter contre le patriarcat censé dominer la société. « Nous avons une culture sexiste et violente », affirmait comme une évidence, lundi sur Europe 1, Alexandre Kouchner, enseignant à Sciences Po : un cliché qui ne résiste pourtant pas aux révélations sur la vraie violence sexiste qui fut imposée par l’État islamique aux femmes chrétiennes ou yézidies (1).
Aujourd’hui comme hier, le conformisme est prêt à singer des moutonneries déjantées. L’autre semaine dans Le Figaro, Luc Ferry rappelait comment la « pensée 68 », en lutte contre l’éducation bourgeoise, en était venue à défendre des « rapports pédérastiques entre maîtres et élèves » ! Cette fois, la lutte contre l’oppression du mâle blanc occidental hétérosexuel est prétexte à des révisionnismes historiques, préludes aux chasses à l’homme. Partout, le déconomètre du camp du Bien s’emballe. En Grande-Bretagne, une école a effacé le nom de Winston Churchill car le résistant au nazisme fut aussi un défenseur de l’Empire. Aux États-Unis, c’est Abraham Lincoln et George Washington qui incommodent les idéologues du repenti. « Aujourd’hui, on peut violer pratiquement toutes les lois si on est dans la ligne du politiquement correct », s’alarme l’écrivain américain Thomas Chatterton Williams (L’Opinion, mardi). Cette « morale » réclame la censure.
Le statut de victime autoproclamée justifie des aberrations. La scène médiatique est devenue un forum psychiatrique. S’y étalent sans pudeur les névroses, les ressentiments, les douleurs enfouies. La justice populaire est invitée dans l’urgence à pallier la prudence du droit. Dans les affaires d’inceste et de pédophilie, la foule mateuse et lyncheuse commente les intimités exposées: la présomption de culpabilité du père est la règle. Se dire fragile suffit à condamner le «dominant». Pareillement, le législateur est prêt à réparer l’«injustice» faite aux femmes tributaires de l’homme pour faire un enfant. Si le Sénat a pu s’opposer à l’extension de la procréation médicale assistée (PMA) pour les couples de femmes, le gouvernement entend imposer cette filiation fictive. Derrière elle se profilent les embryons transgéniques et chimériques. Faudra-t-il attendre trente ans pour que des générations effarées dénoncent les lubies contemporaines ?
Limites de la « libération de la parole »
La « libération de la parole » vient justifier ces procès sans preuves. Ils sont lancés par des justiciers obsédés par la revanche et aveuglés par la haine. Pour certains, l’homme est un prédateur sexuel qu’il faut briser. Pour d’autres, il est un colonisateur qu’il faut traquer, y compris sur son sol. Dans les deux cas, des universités, idéologiquement infiltrées, sont devenues les incubateurs de ces luttes des sexes, des races, des civilisations. On est prié d’applaudir aux flots de mots qui débondent depuis le mouvement #MeeToo en 2017. Certes, certaines révélations sur des humiliations perverses faites à des femmes ou à des enfants ont aidé à une prise de conscience sur les aveuglements passés. Acquitté une première fois, Georges Tron, maire de Draveil (Essonne), a été condamné en appel, mercredi soir, à trois ans ferme pour viol sur une employée de mairie, au vu de sa seule emprise hiérarchique, désormais assimilable à une contrainte. Mais qui ose marquer une réserve sur les procédés utilisés par les gendarmes de la Vertu est soupçonné de cautionner le pire. Ainsi fait le terrorisme intellectuel attisé par la meute.
D’ailleurs, cette libération de la parole est plus un slogan qu’une réalité. Les lanceurs d’alerte sur la menace islamiste ou l’immigration de masse en savent quelque chose. Ces deux sujets valent des procès d’intention à ceux qui les abordent. La semaine dernière, c’était un homme de gauche, Didier Lemaire, professeur de philosophie à Trappes (Yvelines), qui subissait la foudre des censeurs pour avoir décrit le poids des fondamentalistes sur la ville. Depuis, il a dû quitter l’enseignement tandis que le maire, Ali Rabeh, est allé distribuer des tracts politiques au sein du lycée. Cette semaine, c’est le mouvement de droite Génération identitaire qui est menacé de dissolution par le ministre de l’Intérieur. Sa faute : militer contre l’immigration incontrôlée et l’offensive islamiste. Gérald Darmanin, qui cherche à criminaliser la pensée de ce groupuscule, participe à l’interdiction d’une libre expression sur deux sujets qui passionnent l’opinion. Faudrait-il dissoudre le peuple mal-pensant et en élire un autre, comme le suggérait Bertolt Brecht ? La pensée totalitaire n’est plus loin.
Les résistances arrivent
Devant cet effondrement de la raison, les résistances arrivent, heureusement. Pour faire face à l’offensive indigéniste et décoloniale, singulièrement en sciences sociales, Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, a tenté mardi d’alerter sur l’entrisme de l’islamo- gauchisme. Renaud Camus vient d’être relaxé pour un tweet, au nom de la liberté d’expression. Quant à Cyril Bennasar, il dénonce avec brio « l’arnaque antiraciste » (2) symbolisée par la militante Rokhaya Diallo. Serait-ce le début de la fin ?
Notes
(1) « La Putain du califat », de Sara Daniel et Benoît Kanabus, Grasset.
(2) « L’Arnaque antiraciste expliquée à ma soeur », Mordicus.
Source : Figaro 19/02/2021
11:56 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0) | |
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