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vendredi, 24 février 2012

Une lettre ouverte de Jean-Claude Rolinat à Yves Calvi, journaliste à France 5 :

1977711293.jpgCONCERNE :

Emission «  C DANS  L’AIR »

du mercredi soir 22 février relative

à la guerre d’Espagne

 

Monsieur Calvi,

 

Vous animez généralement des  émissions d’une très bonne tenue portant sur l’actualité : les intervenants sont souvent des spécialistes reconnus ou talentueux. On ne se coupe pas la parole, on est loin des « basse-cours » de certaines émissions proposées par vos confrères. Sous la baguette…magique ( ?)  d’Yves Calvi, ça fonctionne plutôt bien pour le plus grand confort d’écoute du téléspectateur. Après tout, « bon sang ne saurait mentir »…

 

Quelle ne fut pas ma surprise en regardant ce mercredi soir 22 courant une émission consacrée au juge B. Garzon et, partant de là, à la Guerre d’Espagne (1936-1939).

 

Tout de suite, j’eus une impression de malaise ; je n’avais pas en face de moi des spécialistes devisant techniquement de faits historiques discutables, mais des procureurs s’acharnant à salir unilatéralement quatre décennies de franquisme sans prendre la moindre hauteur. Une attitude qui permettrait de voir les choses avec beaucoup de nuances, tant l’histoire avec un grand « H » n’est jamais blanche ou noire, mais toujours  grise, sujette au fil des ans et à la lumière de nouveaux témoignages identifiables, à une certaine révision. Il existe des historiens honnêtes et des perroquets indignes. On aurait  cru entendre de la « propagandastaffel » contemporaine. Et ces gens-là peuvent avoir un gentil minois, ils n’en sont que plus dangereux. Rien  n’est venu balancer, nuancer ce réquisitoire totalitaire, je n’hésite pas à utiliser le mot, à l’encontre du Franquisme. Et pourtant, pour faire la guerre, il faut être deux et si des crimes de guerre furent commis en Ibérie entre 36 et 39, le camp des « rouges » en a une très belle part. Ce n’est pas moi qui le dit, mais l’écrivain espagnol de renom Michel del Castillo qui fut contemporain de cette guerre et dont la maman était plutôt dans le camp de ceux que l’on nomme improprement « républicains ». On parle beaucoup du bombardement de Guernica où s’illustra d’une façon tragique la Luftwaffe, mais on ne parle jamais des massacres  de Paracuellos commis par les bolchéviques. Page 255 de son ouvrage,  « Le Temps de Franco », Fayard 2008, l’auteur précité écrit :-« …Un plan exécuté de sang-froid. On s’étonne en 2008, de ne trouver que de brèves allusions à cette « évacuation définitive » dans les biographies les plus épaisses, si riches en considérations psychologiques, par ailleurs, sur la personnalité du Caudillo. Comment expliquer cette pudeur ? Tout se passe comme si les victimes de ces purges sanglantes méritaient à peine une mention. » Tout cela pour vous dire que 10 500  personnes sont passées, si j’ose dire, par « pertes et profits ». Quand on évoque la Guerre d’Espagne, c’est très simpliste : d’un côté il y a les « bons », les républicains-démocrates qui assassinaient à tour de bras leurs adversaires politiques, allant jusqu’à exhumer  les corps de religieux et de religieuses -, photos à votre disposition -, et les mauvais, forcément  les défenseurs des classes aisées   et  des piliers d’église. Mais l’histoire espagnole de cette période est un peu plus compliquée, elle n’est pas si manichéenne. Si le soulèvement militaire du 18 juillet  1936 a eu lieu, c’est qu’il avait été précédé de nombreuses violences anticléricales, certes, mais pas seulement, de l’assassinat du leader de droite  Calvo Sotelo et, dès les toutes premières heures du conflit, de l’exécution de José Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange. La  République espagnole, « bourgeoise » et modérée dans un premier temps, bascula dans l’horreur du communisme, ce qui entraina bien évidemment l’intervention de l’armée, garante de l’ordre public et comptable de l’intégrité nationale. Si les nationalistes,-  Phalange, Carlistes, militaires, Chrétiens engagés-, gagnèrent au bout de trois années de terribles combats, ils le durent à leur courage et, objectivement, à l’aide des forces de l’Axe. Mais, dans le camp « d’en face », Moscou déploya tout son arsenal pour sauver cette « République » à la sauce soviétique et mit à sa disposition ses « brigades internationales » qu’un certain Monsieur Jacques Chirac a voulu faire reconnaitre comme « anciens combattants », tout au moins pour ce qui était des ressortissants français. Cette  terrible guerre civile, comme celle qui divisa au  XIXe siècle les Etats-Unis a fait près de 600 000 morts ! Au lendemain de ce conflit, la répression a été impitoyable, je vous l’accorde. Mais pendant les 36 années de règne du général Franco l’Espagne s’est apaisée, elle s’est reconstruite dans l’ordre et la paix, s’est ouverte au progrès. Ses institutions politiques inspirées de la démocratie organique pouvaient passer pour un Etat totalitaire : rien n’était plus faux. L’Espagne franquiste était un Etat autoritaire mais en aucun cas de « type fasciste » : on ne régentait pas la vie d’un homme de zéro heure à 24 h, on ne le prenait pas en  main du berceau au cercueil comme dans les tyrannies théocratiques ou communistes. Il pouvait y avoir quelques ressemblances à l’occasion des grands rassemblements de foules, place d’Orient, mais personne n’était contraint d’y assister. Le  régime franquiste a  été institué par référendum populaire et le « Caudillo » n’était que le fondé de pouvoir de la monarchie, règne monarchique seulement mis entre-parenthèses pendant les trois années de guerre civile. À la mort de Franco, justement pleuré par une immense partie du peuple, une page s’est tournée et la monarchie constitutionnelle s’est tranquillement mise  en route sur les  rails forgés par le généralissime. Qu’il y  ait eu des massacres, des fusillades arbitraires, des disparitions, nul ne le nie. Mais toutes ces horreurs ont été le fait des DEUX CAMPS. Or, il semble bien que le juge Garzon, par préjugé idéologique, ne se soit occupé que  des victimes  des armées nationalistes.

 

La Grande Croix qui s’élève majestueusement au Val de Los Caïdos veut être justement le symbole, par-delà la mort de tant de valeureux combattants des deux camps enterrés là, d’un certain apaisement, d’une réconciliation, d’une Espagne enfin pacifiée, voulant tourner la page sans oublier ceux des siens qui sont restés dans cette terrible guerre contemporaine.

 

Eh bien, aimant tellement votre émission et appréciant votre talent d’animateur, ce rôle d’arbitre cultivant l’humour, je tenais à vous faire part de ma déception après cette lamentable prestation.

 

En espérant échapper dans l’avenir à ce type d’émission partisane, je vous prie de croire, Monsieur Yves Calvi, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.

 

Jean-Claude Rolinat

Ecrivain

Elu local en Ile-de-France

Membre du Bureau de la NDP

22:00 Publié dans Le bloc-notes de Jean-Claude Rolinat | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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