samedi, 19 juillet 2025
La drogue, fléau, marqueur et accélérateur de la décomposition française
Synthèse nationale
Aujourd’hui, dans le monde en général, et en France en particulier, le fléau de la drogue atteint des proportions particulièrement graves. Si l’on s’en tient à la seule métropole (mais les DOM-TOM, bien entendu, sont tout autant – sinon davantage – concernés), cannabis, cocaïne (les deux principaux produits) et autres substances hallucinogènes (tels le crack, le LSD ou l’héroïne) y arrivent à flot continu et en quantité croissante. Que ce soit du Maroc, par go fast via l’Espagne, ou d’Amérique latine et d’Asie, par containers débarqués dans les ports de Rotterdam, d’Anvers, de Hambourg ou du Havre. Résultat (constaté par la commission d’enquête sénatoriale, dans son rapport sur l’impact du narcotrafic en France, rendu public le 14 mai 2024) : « Notre pays est désormais confronté à une véritable submersion ».
Les données sont à cet égard particulièrement édifiantes.
Le trafic de drogue est, de loin, le marché criminel "national" le plus important. Son chiffre d’affaires annuel se situe entre 3,5 et 6 milliards d’euros, c’est-à-dire, en s’en tenant à l’estimation basse, au même niveau, à peu près, que celui d’entreprises comme Spie Batignolles, Bio Mérieux SA, Boulanger ou Décathlon France. Il emploie, directement ou indirectement, 200 000 à 240 000 personnes - dont 21 000 à temps plein – (soit un peu moins que la SNCF - 276 000 employés - mais davantage qu’EDF - 165 000 -) qui se répartissent de la manière suivante : « environ 110 000 détaillants et vendeurs de rue, 80 000 semi-grossistes, 8 000 grossistes et 1 000 têtes de réseaux » (Estimation des marchés des drogues illicites en France, 2016, Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice -INHESJ-, étude mentionnée par Jérôme Fourquet, dans son livre L’archipel français, Seuil, 2019), pour un total de 3 000 à 4 000 points de deal répartis sur l’ensemble du territoire.
Cannabis : la défonce à grande échelle
Qu’on l’appelle haschich, herbe, beuh, shit ou kif, le cannabis reste, de loin, le principal produit. Pourtant, son usage est loin d’être anodin (d’autant que la teneur moyenne en THC a augmenté ces dernières années). Le site de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) énumère les conséquences néfastes d’une consommation régulière : désintérêt pour les activités habituelles, fatigue physique et intellectuelle, difficultés de concentration et de mémorisation, humeur dépressive, aggravation de certains troubles psychiatriques ; sans oublier l’impact sur la santé dans plusieurs domaines : accidents de la route, certains cancers, certaines pathologies de l’appareil circulatoire et respiratoire, ainsi que certaines pathologies mentales...
L’essentiel de cette came "grand public" qui inonde la France provient du Rif, au Maroc (la première région de production), où, selon Le Monde, « cette culture est à la fois interdite et tolérée par les autorités pour maintenir une certaine forme de paix sociale » (Aurélie Collas, 4 mai 2023). 55 000 hectares de terre lui sont consacrés et 400 000 personnes en vivent (leur travail ne représentant toutefois que 4% de la valeur du produit fini). Comme disait Charles Pasqua, « quand on a de tels amis, on n’a pas besoin d’ennemis »…
Les arrivées sont telles que le shit s’est largement "démocratisé" (les saisies nous en donne une idée : près de 125 tonnes en 2023 et 101 tonnes en 2024). Aujourd’hui, sa consommation concerne toutes les strates de la population. Elle est devenue, selon l’expression de l’analyste politique Jérôme Fourquet, « un fait social majeur ».
Les chiffres de l’enquête publiée par l’OFDT pour 2023 le montre bien. Ainsi, un peu plus de 50% des personnes interrogées ont déclaré en avoir consommé au moins une fois dans leur vie (soit quatre fois plus qu’en 1992) : 57,6% des hommes et 43,4% des femmes, mais 60% des 25-44 ans ! Et un peu moins de 11% ont déclaré en avoir consommé au moins une fois au cours des douze mois précédents l’enquête (2,5 fois plus qu’en 1992) : 14,5% des hommes et 7,2% des femmes...
D’après les estimations, notre pays compterait 5 millions de personnes ayant consommé du cannabis dans l’année (22 millions dans l’UE). 1,3 million en consommeraient régulièrement (au moins 10 fois dans le mois) et 850 000 seraient des consommateurs quotidiens (dont 6,6% des 18-24 ans interrogés).
Cocaïne et ecstasy (MDMA) : une défonce plus confidentielle, mais qui gagne du terrain
Ces deux drogues, de plus en plus disponibles, ont vu leur prix baisser fortement : 65 euros en moyenne pour un gramme de coke en 2021, contre 180 à 230 euros – 1 200 à 1 500 francs - en 1990. Aussi le pourcentage des utilisateurs au cours des douze derniers mois a-t-il été multiplié par 9 parmi les 18-64 ans, entre 2000 et 2023 : pour la cocaïne, il est passé de 0,3% des personnes interrogées à 2,7% ; et pour l’ecstasy, de 0,2% à 1,8%. En 2023, 9,4% des personnes interrogées ont déclaré avoir consommé de la cocaïne au moins une fois dans leur vie (contre 5,6% en 2017) ; et 600 000 personnes environ en ont pris au moins une fois dans l’année (contre quelque 400 000 pour l’ecstasy). Mais chez les 25-44 ans, la proportion frôle les 14%…
Un trafic juteux et des "marchands de mort" de plus en plus "désinhibés"
En moyenne, les points de deal rapportent entre 15 000 et 20 000 euros par jour mais les plus gros peuvent générer un chiffre d’affaires quotidien d’environ 100 000 euros…
Qui dit sommes colossales en jeu, dit absence de scrupules en proportion. La violence des marchands de mort est donc sans limites, comme est venu nous le rappeler le meurtre épouvantable d'un jeune de 19 ans, il y a quelques jours, près de Nîmes. Désormais, plus rien n’arrête les paumés matérialistes et les brutes désinhibées, déshumanisées, pour la défense de leur business : expéditions punitives, fusillades à l’arme de guerre, recrutement de tueurs à gages de plus en plus jeunes, meurtres en série, abominations diverses destinées à terroriser… La France n’est peut-être pas encore "mexicanisée" mais elle en prend le chemin !
Selon l’Office central de lutte contre la criminalité organisée (OCLCO), les « différends » liés au trafic de drogue expliquent « 80 à 90% du nombre total des règlements de comptes, des meurtres et des tentatives de meurtre entre délinquants ». Ainsi, en 2023, on a dénombré 139 morts (dont 49 rien qu’à Marseille) et 413 blessés et en 2024, 110 morts et 341 blessés…
Les premières victimes des affrontements sanglants entre gangs sont les "petites mains" des réseaux ("choufs", rabatteurs, vendeurs ou "nourrices"), elles aussi de plus en plus jeunes. Pour l’exemple, elles sont assassinées (en raison de dettes fictives, créées de toutes pièces par leurs "employeurs"), torturées, voire brûlées vives… Mais il y a aussi des innocents, frappés pour s’être trouvés au mauvais endroit, au mauvais moment.
Un océan écopé à la petite cuillère
Selon le ministère de l’Intérieur, 36 429 personnes ont été interpellées en 2023 pour trafic et/ou consommation de drogue. Quand on met ce nombre en relation avec ceux des utilisateurs et des trafiquants (entre 5 et 6 millions de personnes), on comprend la réflexion de Bruno Bartocetti, responsable de la zone sud pour le syndicat Unité SGP-Police-FO, à Marseille (cité par Frédéric Abela, dans un article de La Dépêche du 29 octobre 2024) : « On a toujours l’impression de vider l’océan avec une petite cuillère ».
Aujourd’hui, ce sentiment désespérant est d’autant plus prégnant que l’imagination et la capacité d’adaptation des dealers sont grandes. Ainsi, face aux opération "coup de poing" de la police, la livraison à domicile se développe, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 (un livreur pouvant toucher 1 100 euros par semaine)...
La drogue : un marqueur et un accélérateur de la désintégration française
Pour Jérôme Fourquet, « la montée en puissance » de la consommation de drogue « et sa dissémination dans les différents milieux sociaux ont (…) fortement contribué à métamorphoser le visage de la société française au cours des dernières décennies ». Quant au trafic, il a « un impact majeur sur la fragmentation de la société française », notamment parce qu’« il joue le rôle de "principe actif" dans la dérive de très nombreux quartiers populaires, (…) sur tout le territoire » (L’archipel français, éditions du Seuil, 2019).
Jérôme Fourquet a raison. La consommation et le trafic à grande échelle de produits stupéfiants sont à la fois une cause et une conséquence du délitement, de la fragmentation de notre société, en lien avec la montée de l’individualisme, de l’hédonisme, du consumérisme, de l’affaiblissement des liens de cohésion nationale, du "déboussolement" et de la fragilisation des individus, de la submersion migratoire, du refus de l’assimilation ou de l’intégration et de la communautarisation qui en découle…
La drogue contribue à saper un peu plus encore une communauté nationale déjà bien fragilisée. Aussi est-il plus que temps que l’ensemble des acteurs concernés (police, justice, etc.) lui livrent, en étroite coopération et coordination, une guerre totale, sans merci. Le pays l’attend, le pays l’exige ! Guerre à la drogue !
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