Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 11 avril 2021

À PROPOS DE LA CHASSE À COURRE

jkkgfd.jpg

Tirons sur la chasse !

Article publié dans le n°56 (hiver 2020 2021 - cliquez ici) de la revue Synthèse nationale dans la rubrique "Les pages du marquis".

Jean-Paul Chayrigues de Olmetta

Écrivain, directeur d'émission sur Radio Courtoisie, Président des Amis de Synthèse nationale.

Eh bien oui, je suis un monstre. J'assume ! J'aime la France. Celle des rois et des deux empereurs. J'apprécie les visites dans les autres pays. Enrichissantes... Mais, après chaque pérégrination, quelle joie de retrouver l'Hexagone !

Je ne peux prier que dans la Tradition (que voulez-vous ? Mon éducation sans doute) et suivre la Sainte-Messe qu'en latin.

Je suis fanatique du Grand Opéra appréciant, toutefois, Edith Piaf et Léo Ferré, entre autres. J'ai été élevé par un beau-père éditeur de musique et surtout administrateur de la Réunion des Théâtre lyrique nationaux.

Je déguste le spectacle de la corrida (à laquelle je me suis exercé, à Séville, dans les années soixante...) l'un des symboles forts de l'Espagne triomphante et machiste. En tête, j'ai le souvenir des amours brûlantes du célèbre matador Luis-Miguel Dominguin et de notre B.B. nationale qui n'avait pas encore pensé à sa fondation pour les animaux. Il est tout à son honneur de ne rien renier.

Et voici le bouquet : je suis passionné de chasse à courre ! Horreur, je n'ai aucune explication à cette dépendance ("addiction" en français...).

Régulièrement (accidents ou pas) la vénerie revient sur le devant de la scène médiatique toujours pour exiger sa mort. La Covid met temporairement en recul cette fureur réactivée l'an passé à la suite d'un drame. Une femme, enceinte de six mois, morte à la suite de morsures de chiens (sic).

La triste affaire du chien Curtis

Penchons-nous sur cette histoire éclairante sur le sujet. Un an déjà... Le 3 novembre 2020 les médias annoncent sommairement les conclusions officielles sur la mort d'Élisa Piarski. Son décès avait provoqué beaucoup de tapage... Et pour cause.

10 novembre 2019, Forêt de Retz (Aisne). Tôt le matin, la jeune Élisa part courir avec Curtis, le chien de Christophe Ellul, son compagnon. Au lointain se déploie une chasse à courre avec une meute d'une quarantaine de chiens de grande vénerie (des "Français tricolores"). Il semblerait qu'Élisa ait croisé un promeneur avec un chien. Curtis s'énerve, s'agite et la mord. Apeurée elle appelle son maître et entraîneur (qui le dresse à la discipline du "mordant", interdite par la loi). Arrivé sur place, il constatera la mort de son amie couverte de morsures. Immédiatement, la rumeur devient version officielle : "Elle a été dévorée par des chiens. On connaît les coupables, la meute... Si la chasse à courre était interdite, de telles horreurs ne se produiraient pas !"... Jacques de La Palice, le maître d'équipage incriminé fût jeté en pâture aux "anti-tout" particulièrement remontés contre la chasse de toutes natures. Très digne, il tentait (precdicare deserto) d'expliquer, en vain, que les heures, lieux, traces des chiens ne correspondaient curieusement pas à la triste réalité. Ses chiens n'étaient pas concernés. Que nenni ! "À mort le mosieu du château ! "

Au final, il s'avère qu'après une année d'expertises nombreuses, fiables (et coûteuses) concernant l'ensemble de la meute, le seul coupable est Curtis. Il n'y aura aucune excuse. Que des protestations véhémentes du propriétaire de Curtis. J'imagine bien volontiers sa tristesse : sa compagne et son bébé sont morts et Curtis promis à l'euthanasie. J'espère que le sort de la chasse à courre n'est pas encore joué. Je crois à la résistance des veneurs qui sont mieux préparés pour disserter de la vénerie que les "écolos" revanchards volontairement aveuglés sur le sujet (comme sur bien d'autres).


Parlons donc de la chasse à courre

Cette forme de chasse est immémoriale. Née dans la vieille Europe, on la retrouve, à partir du XVIIIe siècle, tant en Amérique du nord que du sud, une partie de l'Amérique centrale et de l'Afrique. La réalité est simple : cette chasse est l'une des plus naturelles. Un animal sauvage, rusé, est poursuivi par des chiens (descendants du loup-prédateur) lesquels sont encadrés et remis dans la bonne ligne par des cavaliers censés parfaitement connaître la forêt où se déroule l'événement. Souvent, l'animal chassé parvient à se fondre dans le paysage. L'équipage rentre alors bredouille. "Revenir la queue entre les pattes" s'applique, dès l'origine, à la meute. Puis, par glissement, aussi aux suiveurs... Toutefois, si l'animal est supposé blessé, il sera recherché afin d'être achevé pour lui éviter une agonie plus ou moins longue. C'est ainsi qu'une sortie puisse se terminer à la lueur des torches. Rattrapée et sur ses fins, la bête est achevée par un piqueux. Rarement au fusil. Si un lieutenant de louveterie est présent, c'est à lui que revient cette tâche. L'animal est mort. Sa poitrine est rituellement ouverte par un maître-chien. La meute patiente bruyamment en grattant le sol. Un valet de chiens soulève la peau (c'est le "lancer de la nappe"), les viscères, gourmandise des chiens, apparaissent. L'odeur de venaison est soudain prégnante. Le premier piqueux abaisse son fouet, les chiens maintenant se repaissent. Un cuissot 1 est découpé et offert aux gendarmes qui, de loin, ont encadré l'exercice. Les autres sont donnés à des associations caritatives de la région.

Ce sont alors "les honneurs du pied" accompagnés des sonneries d'usage à la trompe. Un piqueux tranche net, à hauteur de la cheville, le pied droit avant de la bête. Il le pose ensuite sur sa bombe coiffe en l'air. Le maître d'équipage lui désigne la personne récipiendaire de cet honneur. Lors de la prochaine chasse "son" pied naturalisé, cloué sur un support adonné d'une plaque gravée indiquant la date, le lieu et les circonstances de la prise, lui sera remis avant le départ. D'où l'expression dévoyée "prendre son pied". On doit beaucoup à la vénerie... Sauf si c'est une dame, le bénéficiaire offrira une tournée générale incluant les simples suiveurs. Le pied est offert à un invité, dit de marque, qui a suivi la chasse du jour à cheval. Ce peut être aussi un (ou une) fiancé ou un (ou une) jeune marié. Ensuite les veneurs habitant loin se retirent. Les autres se retrouvent joyeusement dans la propriété de l'un d'entre eux selon le lieu de rendez-vous du matin.

Tout cela a été ponctué par les sonneries adéquates aux diverses étapes du laisser-courre. Ces musiques ancestrales sont le langage international de la vénerie, comme l'anglais est celui des courses hippiques et le latin était celui de l'Église universelle.

Mode d'emploi

Je n'ai, évidemment, rien contre la chasse à tir (le contraire serait un comble) mais je supporte mal que quelques "tireurs" critiquent gratuitement la vénerie. Aussi je rappellerai (ou apprendrai) à ces rustres la grande différence entre notre art et leur amusement. Pour faire court : à tir on vise tout ce qui bouge (à terre comme au ciel), en respectant les interdits. Vous ratez, par exemple, une bécasse, immédiatement, vous réarmez et vous tirez sur la suivante ou sur tout autre gibier passant par là. Le soir, le tableau de chasse peut être foisonnant. À courre, on ne poursuit qu'un unique animal.

Pour un découplé, très tôt le matin, les piqueux (à pieds) repèrent un animal (cerf, chevreuil, sanglier selon les équipages) dans la forêt concédée pour l'exercice. Ils vont ensuite baliser une grande partie du parcours qu'ils ont emprunté. Pour ce faire, ils brisent, selon des normes précises, quelques branches basses qui serviront de repères dans deux ou trois heures, aux cavaliers encadrant la meute. Ces brisées sont des balises. Chaque équipage ne peut suivre que ses propres balises. Impensable de piétiner celle d'un autre rallye... D'où l'expression populaire : "ne pas marcher sur les brisées d'un autre". C'est primordial lorsque plusieurs équipages s'égayent dans la même région.

Le rendez-vous se tient tôt le matin dans une auberge proche de la forêt pour ceux qui souhaitent se restaurer copieusement avant cinq heures de cheval en moyenne. Ceux qui ne connaissent pas parfaitement la forêt et qui craignent de se perdent éviteront de mettre pied-à-terre. Pipi est une "problématique" (comme disent aujourd'hui les cuistres, "problème" suffit !). Traditionnellement, la réunion de départ se tient dans une clairière. Les chevaux et les chiens y sont amenés. À l'heure dite, généralement entre 7 h 30 et 9 h 00, les cavaliers se mettent en selle. Ultimes "précautions" pour ne pas se retrouver tel le "Petit-Poucet" comme indiqué ci-dessus.

D'abord, le respect des traditions ancestrales

À partir de ce moment tous les usages ancestraux seront respectés sans faille. Si un homme double une cavalière, il doit la saluer en soulevant sa bombe. Parfois, c'est un exercice délicat : les doubles-rênes serrées dans la main droite, la cravache dans la gauche et la trompe en bandoulière... Je me souviens en souriant du feu vicomte Hubert de F. qui, en plus, fumait la pipe en même temps. Si une dame chute, un cavalier se doit de lui porter assistance. Lorsqu'un cavalier tombe, les autres poursuivent la chevauchée sauf s'il s'agit d'un homme âgé qui, d'ailleurs, rechigne à recevoir de l'aide.

Les invités (qui sont rarement briffés) doivent s'efforcer de ne pas gêner le travail des chiens. Il est donc très souhaitable de savoir maîtriser correctement un cheval. Jamais un maître d'équipage recevant un invité (même occasionnel) lui demandera les preuves de son aptitude à l'équitation. Le climat est à la confiance.

Les "boutons" 2 portent la tenue de l'équipage en principe de couleurs vives. Les forêts sont souvent sombres... Les invités, eux, revêtent la tenue d'équitation dite "de concours" : culotte blanche, veste et bombe noire, bottes noires simples, gants blancs. On évite la cravache. Les dames invitées, si elles montent en "amazone" 3, portent une longue jupe noire et sont coiffées d'un "lampion" (tricorne).

Vous n'êtes bouton d'aucun équipage et pourtant souhaitez suivre une chasse. Vous pouvez vous faire inviter dans l'un des cent cinquante équipages ou rallyes en exercice aujourd'hui dont les meutes sont "créancées" dans la voie du cerf, du chevreuil ou du sanglier. La démarche est aisée, la Société française de vénerie est très efficace pour vous introduire auprès d'un équipage dans votre région.

Les citadins fraîchement installés à la campagne détestent souvent la chasse. En revanche, las autochtones, de génération en génération, sont rarement hostiles à la vénerie. Ils perçoivent la subtilité de cet art. Ils aiment aussi le chant matinal du coq, les cloches des églises, les odeurs animales et les bruits de dame nature...

La chasse et la vénerie font vivre un grand nombre de personnes dans de multiples activités et font survivre moult habitudes, usages et traditions de la France de toujours.

Modernité de la chasse à courre

En 2010 se produisit un groupe musical au "Petit Montparnasse" à Paris.  Le groupe "Jazz à courre", réunissant des sonneurs de trompe avec des musiciens de jazz, procure les mêmes sensations qu'un groupe de gospels dans une église de Harlem.

Lors de la Saint-Hubert, le sel, le pain et l'eau sont bénis afin d'éviter les morsures. Simultanément les chiens, les chevaux et oiseaux de proie des chasseurs se voient imposer les clés de Saint-Hubert 4 afin d'être protégé de la rage. Il serait bon que les "écolos-bobos-gauchos" en bénéficient aussi.                                                                                                                                                               

Notes

1 Référence à la dictée de Prosper Mérimée.

2 Membre permanent d'un ou plusieurs équipages. À son adhésion, il reçoit un bouton au monogramme du rallye.

3 Pour les femmes, cette position apparaît au XVIe siècle. Elles montent assises du côté tournant l'épaule au côté droit du cheval. Elles utilisent une selle ad hoc.

00:23 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

Les commentaires sont fermés.