samedi, 14 mars 2015
EUROPE : LA LEÇON ISLANDAISE Ils ne veulent pas de cette Europe là
Jean Bonnevey
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Alors que, pour cause de petite stratégie politicienne pour éviter le naufrage des départementales, les partis systémiques se rattachent à l’Europe, certains européens, eux, ne perdent pas le nord.
L’Islande a annoncé jeudi avoir retiré sa candidature à l’Union européenne, deux ans après l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement eurosceptique de centre-droit qui promettait de mettre un terme au processus lancé en 2009. Comme quoi, on peut tenir ses promesses électorales et se passer de l'UE.
Cette décision est l’application simple du programme de la coalition de centre droit arrivée au pouvoir en 2013, qui promettait de mettre fin au processus d’adhésion. « Les intérêts de l’Islande sont mieux servis en dehors de l’Union européenne », a justifié le ministère des Affaires étrangères.
Il avait fallu des circonstances très particulières pour que Reykjavik dépose sa candidature en 2009, le premier gouvernement de gauche de l’histoire du pays, une grave crise financière qui avait ébranlé la confiance des citoyens dans leurs institutions nationales et la chute de la valeur de la couronne, qui avait suscité l’envie d’adopter l’euro…envie vite passée depuis. Plus de six ans après, l'effondrement d'un secteur financier hypertrophié qui avait plongé l'île dans la récession, la principale préoccupation d'une majorité d'Islandais n'est pas l'UE, mais les emprunts contractés durant les années de "boom" économique qu'ils ont du mal à rembourser.
Les sociaux-démocrates islandais n’ont jamais réussi à expliquer à l’opinion comment ils allaient combler le fossé entre Bruxelles et Reykjavik sur les quotas de pêche. Ce sujet épineux n’aura même pas été abordé lors des négociations entre juin 2011 et janvier 2013.
L’Europe déteste les spécificités qui font les nations.
L’adhésion aurait soviétisée la principale ressource du pays. "Le gouvernement n'a pas l'intention d'organiser un reférendum", a précisé le ministère des Affaires étrangères. Et mieux, "si le processus doit être repris à l'avenir, le gouvernement actuel considère important de ne pas progresser sans en référer préalablement à la Nation".
Même si une majorité des électeurs aurait souhaité un reférendum, il semble difficile d'imaginer ce qui pourrait les amener à voter "oui" un jour, alors que le pays bénéficie déjà de nombreux avantages grâce à ses liens avec l'UE, sans souffrir des inconvénients. L'Islande est ainsi membre de l'Association européenne de libre échange (AELE) et applique la convention de Schengen qui permet la libre circulation des personnes. Cela permet au pays d'exporter ses produits de la mer vers le continent sans barrière tarifaire, alors même qu'il est engagé dans une "guerre du maquereau" avec l'UE. Depuis que l'Islande a relevé son quota de pêche en 2010, au motif que le réchauffement climatique aurait fait migrer l'espèce vers le nord, le conflit n'a pas pu être résolu malgré une multitude de réunions. Laisser Bruxelles décider du quota de pêche islandais paraît impensable sur l'île.
L'espace Schengen stimule une autre industrie importante pour le pays, le tourisme, crucial pour les entrées de devises. On peut donc être eurosceptique, européen et hors de l'Union l’assumer et s’en bien porter. Gageons que Manuel Valls parlera peu de l'Islande avant le premier tour de la municipale.
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