Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

samedi, 14 août 2021

Rapport du GIEC sur le climat : et si on passait à autre chose !

climat-jpg.jpg

Benoît Rittaud *

Le sixième rapport du Giec sur l’état climatique de la planète a commencé à être publié. Il a pour écrin médiatique les réentes inondations d’ici et les nouveaux incendies de là-bas car, comme on le sait, les pluies diluviennes n’existaient pas avant l’invention des 4 x 4 et les feux de forêt étaient inconnus avant les Trente Glorieuses.

Le résumé de 40 pages redit ce que le Giec répète en boucle depuis longtemps, y compris ses prospectives tout en conditionnels et en probabilités. L’humour involontaire s’y glisse lorsque n’est « pas exclue » l’éventualité que la mer monte de plus de 15 mètres d’ici à 2300. (L’horizon maximal prévisible atteint péniblement le dixième, ordre de grandeur comparable à celui du dernier siècle écoulé.) La principale évolution dans le discours est sans doute que doubler la quantité atmosphérique de gaz à effet de serre ferait gagner à la planète entre 2,5 et 4 °C, sans exclure les valeurs entre 2 et 5 °C. Jusque-là, le Giec disait entre 1,5 et 4,5 °C... Cette nouvelle bande-annonce hollywoodienne sur le thème du déluge et des flammes de l’enfer signale donc l’épuisement de la franchise. On devine le scénario de ce sixième opus dès la séquence prégénérique. Les débats vont désigner les méchants habituels que sont les multinationales (sans foi ni loi), le consumérisme (débridé), les politiciens (qui ne pensent qu’à leur réélection) ou encore la démographie (galopante, chez les autres cela va de soi). L’optimisme réglementaire rappellera qu’il n’est pas trop tard pour agir, et que le drame se nouera à Glasgow en novembre lors de la COP26. tel sera le nouveau rendez-vous de la dernière chance, tout comme Paris l’avait été en 2015.

En attendant, entre alarmistes inquiets et sceptiques de l’apocalypse les lignes resteront les mêmes. symbole de cette situation figée : un tableau du Giec indique que l’évo- lution de la température globale d’ici à 2040 ne dépendra que très peu de l’évolution de nos émissions. Pour avancer, tournons-nous ailleurs et observons deux informations essentielles apportées par la triste expérience des confinements de 2020. La première : le quasi-arrêt de vastes secteurs économiques à l’échelle mondiale n’a eu aucun effet mesurable sur la courbe du CO2 atmosphérique. Les immenses restrictions que nous avons subies, inimaginables il y a moins de deux ans, sont dérisoires en regard des objectifs de réduction des émissions. La seconde : le colossal trou d’air économique de l’an dernier est déjà pratiquement surmonté. La sobriété imposée par les événements ne s’est donc nullement révélée un horizon dont le corps social aurait « enfin compris » le caractère prétendument joyeux et désirable. L’alternative n’est donc pas pour ou contre ce que le consensus factice sur le climat appelle la science, mais pour ou contre le réel. Celui-ci nous invite à prendre acte que l’énormité des exigences des politiques climatiques restera à jamais bien au-delà du seuil de la douleur économiquement et socialement supportable. Une politique raisonnable devrait donc se focaliser sur l’adaptation. Prendre son parapluie et non prétendre arrêter la pluie. Or, le parapluie, c’est le développement. Certes, celui-ci fait souvent de gros dégâts, mais c’est grâce à lui que l’humanité n’a jamais été aussi bien équipée face aux catastrophes naturelles. C’est aussi grâce à lui que les pays les plus vulnérables, qui sont aussi les plus pauvres, réduiront les effets des aléas météorologiques à des niveaux acceptables.

Plus concrètement, partisans du développement et alarmistes du climat devraient se retrouver sur certains points tels que le nucléaire, car, même si on l’ignore souvent, les centrales nucléaires n’émettent pas de CO2. Enfin, la France devrait rappeler plus souvent qu’à la toise de l’environnement notre pays fait très belle figure. Avant d’exiger quelque chose de nous, la plupart de nos partenaires devraient d’abord balayer devant leur porte.

Ce n’est malheureusement pas le Giec qui nous le dira. Prisonnière de ses discours passés, la bureaucratie climatique semble condamnée aux redites et aux vieilles lunes.

Propos recueillis par Judith Waintraub

Source : Figaro Magazine, 14/08/2021

(*) Benoît Rittaud est enseignant-chercheur en mathématiques et président de l’Association des climato-réalistes. Dernier ouvrage : Géocratia, Ed. du Toucan, 416 p., 10 €

09:40 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

La « communauté catholique », vraiment ?

image.jpg

Mathieu Bock-Côté

L’assassinat du père Olivier Maire a bouleversé la France, qui n’a pu s’empêcher d’y voir un écho du sort réservé au père Hamel, il y a cinq ans. Le scénario diffère cette fois, certes. Nous ne sommes pas devant un islamiste égorgeur comme il y en a tant, mais devant un immigré clandestin, qui n’aurait pas dû être en France, qui l’an passé avait incendié la cathédrale de Nantes, et qui cette année a décidé d’égorger le prêtre qui l’accueillait chez lui par charité chrétienne. Les ratiocinations psychiatrisantes qui accompagnent le commentaire lorsque vient le temps de parler de l’auteur de ce meurtre ne sauraient faire oublier que nous sommes témoins, de manière caricaturale, d’une faillite de l’État régalien, devenu incapable d’assumer sa fonction première, croulant sous la pression du gouvernement des juges, des groupes de pression immigrationnistes et de l’humanitarisme médiatique, qui le condamnent à l’impuissance quand vient le temps de se défendre.
Pourtant, quelque chose de plus et, pourrait-on dire, d’encore plus triste, s’est révélé dans cette histoire. Au moment de présenter leurs condoléances, ils furent nombreux, parmi les politiques, à se dire bouleversés pour la communauté catholique française. Cette formule biscornue qui tournait en boucle et se voulait pleine d’empathie était révélatrice de la segmentation de la communauté nationale, où l’assassinat d’un homme est d’abord censé heurter sa communauté particulière, et seulement ensuite l’ensemble de la nation, comme si le langage politique avait intériorisé les paramètres du multiculturalisme anglo-saxon. La France, dans cette perspective, n’est plus d’abord composée de Français participant au destin national, à travers un pacte politique noué dans l’histoire et la culture, mais d’un assemblage de communautés enfermées dans leur expérience du monde, qu’elle soit ethnique, religieuse ou même sexuelle. Le langage de la diversité masque la désagrégation du peuple français. Il y a peut-être même pire. Le catholicisme, selon ce que l’histoire enseignait jusqu’à récemment, n’était pas une communauté religieuse parmi d’autres en France, mais la matrice existentielle du pays, qui a structuré le rapport au politique et à la culture, aux mœurs et à l’architecture, et qui, encore aujourd’hui, codifie l’univers rituel de l’immense majorité des Français. La référence, dès lors, à une «communauté catholique», qui représenterait une nuance identitaire parmi d’autres d’un pays bariolé, témoigne d’une rétrogradation symbolique majeure du catholicisme ou, si on préfère, de son dénoyautage culturel. Longtemps combattu au nom d’une conception quelque peu étroite de la laïcité, le catholicisme est réintroduit dans la communauté nationale à condition de ne plus en être considéré comme l’un des fondements.

On ne le nomme que pour l’exclure de sa fonction identitaire historique. On a entendu parler, ces dernières années, de manière assez fréquente, de «catho-laïcité». La formule suscite souvent un agacement allant jusqu’à la méfiance : comment faire tenir ensemble au point d’en constituer une synthèse deux concepts représentant des visions du monde s’étant ardemment combattues depuis la Révolution ? Pourtant, dans une époque marquée par l’affrontement des civilisations sur le territoire même de l’Europe occidentale, ce qui semblait hier disjoint et conflictuel trouve à s’assembler de manière inédite et féconde, en découvrant le monde commun qu’elles avaient en partage et qui remonte à la surface devant le visage hostile de l’altérité conquérante. La question de l’islamisme, notamment, est venue troubler les anciennes polarisation et révéler les limites d’affrontements aujourd’hui éculés.

De même, la gauche républicaine et la droite patriote et conservatrice ont aujourd’hui bien plus en commun que ne le laissent croire leurs univers symboliques respectifs, même si certains atavismes les empêchent d’en prendre pleinement conscience.

On en revient dès lors à la manière d’aborder un crime abject n’ayant rien d’un malheureux fait divers, qui heurte intimement les Français et tous ceux qui aiment la France, et qui devrait être nommé de cette manière, sans conjuguer le chagrin qu’il suscite avec une logique communautariste. Quelle que soit leur religion, et qu’ils croient au ciel ou qu’ils n’y croient pas ou qu’ils le scrutent dans l’espoir incertain d’y repérer une trace du divin, c’est d’abord en tant que Français qu’ils sont heurtés, et la classe politique devrait avoir le souci de se faire la gardienne de ce primat de la conscience nationale, qui seule peut faire tenir ensemble des hommes et des femmes qui finiront sans cela par vivre face à face, selon la formule désormais convenue. Si la classe politique elle-même renonce à cette tâche, pourtant fondamentale, si elle capitule devant les fous qui ont concassé au marteau-piqueur de la déconstruction la réalité intime de la nation, elle se rendra malgré elle complice de ces derniers.

Source : Le Figaro 14/08/2021

07:58 Publié dans Revue de presse | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |