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mardi, 05 décembre 2023

L’inutilité judiciaire du nouveau procès de Monique Fourniret

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La chronique de Philippe Randa

Beaucoup ont aujourd’hui du mal à imaginer que, des siècles durant, les populations n’aimaient rien tant qu’à assister aux exécutions publiques, si ce n’est pour une partie de « tous les brav’gens de la Terre » d’assister, lorsque l’occasion s’en présentait, aux lynchages de supposés criminels, voire simple délinquants…

Des supplices de la crucifixion durant l’Antiquité aux jeux du cirque où l’on livrait les condamnés aux fauves pour qu’ils s’en repaissent, aux « sorcières » que l’on brûlera quelques siècles plus tard, tout autant qu’aux criminels que l’on écartèlera pour la plus grande joie d’une assistance dont femmes, enfants et adolescents ne seront pas écartés, « y’aura d’la joie, de l’excitation et des satisfactions » à assister à la souffrance des suppliciés.

C’était il y a si longtemps que cela ? Ah bon !

Rappelons que la dernière exécution publique en France est celle du tueur en série allemand Eugen Weidman à Versailles en 1939 : un reportage de Match relatant l’hystérie de bourgeoises se précipitant pour tremper leur mouchoir dans le sang du monstre (qui s’avéra une invention de journaliste en mal de sensationnel) aura néanmoins un tel retentissement qu’Édouard Daladier, président du Conseil, promulguera un décret-loi abolissant les exécutions capitales publiques qui auront lieu ensuite dans l’enceinte des prisons… sauf à la fin de la IIe Guerre mondiale où exécutions et humiliations publiques se multiplieront en France…

Et la foule – la populace ? – sera alors toujours aussi nombreuse et enthousiaste à se presser dans les rues pour voir défiler ces dames accusées de « collaborations horizontales » qu’on promenait (avant d’en abuser généralement) dans le plus simple appareil après les avoir tondues, certaines avec leurs nouveau-nés dans les bras : même pour un tel spectacle, les « libérateurs » et pour beaucoup « résistants de la 25e heure », ne séparaient pas les mères de leurs progénitures, tout de même !

Autres temps, autres mœurs, diront beaucoup… Certes ! De nos jours, on n’humilie plus en public ! On n’exécute plus ! Mais… on fait procès !

Celui qui défraie actuellement la rubrique criminelle judiciaire (re)met en scène Monique Fourniret, ex-épouse du dégénéré sexuel – violeur, pédophile et tueur en série – Michel Fourniret ayant reconnu 11 victimes, mais reconnaissant que sa mémoire faisant défaut, le chiffre pouvait être plus élevé.

Il mourra en 2021, après une condamnation en 2008 à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible (tout de même !), tandis que Monique Fourniret sera pour sa part condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité, mais assortie d’une période de sûreté de 28 ans.

Qu’à cela ne tienne, depuis le 28 novembre dernier et désormais âgée de 75 ans, elle est de nouveau jugée par la cour d’assises des Hauts-de-Seine à Nanterre pour complicité dans trois dossiers de meurtre attribués à Fourniret et qui ont défrayé la chronique…

La question qui se pose est tout de même « À quoi bon ? »… Qu’est-ce qu’elle n’aurait pas révélé précédemment et qui apporterait… quoi ? L’endroit exact où est enterré le cadavre de la petite Estelle Mouzin ? On pourrait l’espérer pour la famille, certes, mais si depuis près de deux décennies, elle n’a rien dit, n’en a pas souvenir ou ne l’a jamais su, qui peut croire que l’ex-épouse de l’Ogre des Ardennes apportera des renseignements d’importance que les enquêteurs de l’époque n’auraient pas su lui soutirer ?

La justification apportée est que « pour la première fois (elle) comparait seule, sans son ex-mari »… Après tant d’années et après avoir déjà révélé et avoué sa participation à certains des crimes de son mari, quelle information n’a-t-elle pas encore « balancée » ?

Sauf rebondissement (et je ferais mon mea culpa, promis), ce nouveau procès, comme tant d’autres, contribue donc à encombrer un peu plus les tribunaux, mobilisant des dizaines de fonctionnaires (juges, secrétaires, policiers, avocats, etc.) et aboutira probablement à… rien !

Monique Fourniret, née Olivier, retournera à l’ombre purger sa réclusion à perpétuité, espérant (ou peut-être pas, allez savoir !) qu’un juge ne l’en fasse un jour sortir debout pour « raison de santé » et non les pieds devant… emportant avec elle des secrets qu’elle n’aura jamais avoués, qu’elle aura oubliés, sinon toujours ignorés… Le diable seul le sait !

Mais le temps de ce procès, les médias auront fait de cette inutilité judiciaire leurs profits en titrant pour accrocher le chaland sur « les derniers secrets » (France info) ; « Dangereuse, moi ? Ça va pas » (BFMTV) ; « Monique Olivier dit « regretter tout ce qu’il s’est passé » (sic !) (Le Parisien) ; « 1er procès “Cold Case” » (village-justice.com ; « En dehors de la chose, Fourniret était gai » (lesjours.fr) ; « Pourquoi son QI fait débat » (Yahoo ! actualités)… on en passe, des plus odieux ou ridicules, le lecteur n’ayant que l’embarras du choix.

Finalement, la « populace » trouve aujourd’hui à se repaître sans sortir de chez soi grâce à sa télé, sa tablette ou son smartphone comme le permettent désormais les formidables progrès technologiques… et ce, avec l’hypocrite certitude de croire que jamais, ô grand jamais ! elle n’aurait été, elle, assise sur les gradins des cirques romains, n’aurait festoyé sur les places des villages en nos contrées lointaines ou applaudi en place de Grève ou de l’estrapade à Paris…

« Autre temps », oui, assurément, mais « autre appétence » ? Sûrement pas…

11:33 Publié dans Philippe Randa | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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