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samedi, 01 mars 2025

La dérive des continents

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Philippe Gélie

L’Amérique de Donald Trump est déjà loin de l’Europe. Alignée de fait sur les positions de Moscou à l’orée d’une négociation qui engage la sécurité de notre continent, elle poursuit ses intérêts sans considération pour le passé, les alliances ou les « valeurs ». Ceux qui croient encore pouvoir rattraper le président américain par la manche, grâce à leur attrait économique ou un sursaut de conscience lui révélant ses vrais amis, se ménagent un réveil brutal. Dans la jungle de Trump, les amis sont des profiteurs qu’il faut traiter en vassaux.
Rien de bien neuf sous le ciel des relations internationales : chaque dirigeant se soucie avant tout des intérêts de son pays - la différence tient à la façon dont il les définit et les défend. En l’espèce, ranger toutes les décisions de Trump au rayon de la priorité nationale ne rend pas justice à sa singularité. L’homme d’affaires pragmatique se révèle extrêmement idéologique. Sa révolution vise à détruire un ordre dans lequel il estime que les États-Unis se font abuser - quand bien même ils l’ont eux-mêmes bâti et imposé.

Cette force hostile venue de l’ouest est relativement nouvelle pour les Européens. Elle les place en étau entre un autocrate belliqueux qui déstabilise le continent et un marchandeur sans scrupule qui négocie son parapluie sécuritaire, les menace d’une guerre commerciale et soutient en leur sein des forces radicales. À Moscou, Vladimir Poutine n’en croit sûrement pas ses yeux et ses oreilles : qui aurait parié sur une telle dérive des continents, dans laquelle l’Amérique se rapproche de la Russie en passant par-dessus l’Europe ?
En dépit de ce qu’il voit comme ses intérêts, Donald Trump n’a pas grand-chose à gagner dans son alignement sur le Kremlin. Il demande la paix à toute vitesse, mais l’autre veut la victoire et a tout son temps. L’Américain fait le jeu d’un tsar convaincu du déclin inéluctable de l’Occident démocratique et capitaliste, et qui voit en lui un accélérateur de l’Histoire. Certitude partagée par son homologue chinois, dont Washington espère briser l’alliance avec Moscou, sous-estimant la force de leur pacte idéologique. Problème : quand le chef de la Maison-Blanche se trompe de cible, c’est autant aux dépens de l’Europe que des États-Unis.

Source : Figaro 01/03/2025

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