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mercredi, 26 octobre 2011

Peut-on rire de tout avec notre Belle Jeunesse ?

Ph Randa.jpgLa chronique
de Philippe Randa
 
Connaissez-vous L’Actu ? Non ? C’est que vous n’êtes alors ni parent, ni adolescent… Car L’Actu, c’est le quotidien de « l’actualité en dix minutes », soit 8 pages en couleurs, en articles courts, en brèves et en dessins humoristiques, publié à l’intention des collégien(ne)s et lycéen(ne)s, « dès 14 ans », afin de les inciter à s’intéresser à la vie publique… et l’on se doute que son but, fort louable, est également de leur donner l’habitude de lire un journal… Plus tard, ils passeront ainsi plus facilement à la lecture des grands médias nationaux, espère-t-on. Pourquoi pas !

Soyons juste, les articles sont plutôt honnêtes, davantage en tous cas que la plupart de ceux publiés dans la Presse que j’appellerais par commodité « adulte », en témoigne le « dossier » consacré il y a quelques mois à la présidente du Front national qui faisait alors la Une avec ce titre « Et si Marine Le Pen était Présidente, à quoi ressemblerait la France ? » : une présentation objective, sans complaisance, mais sans haineuse dénonciation non plus : « scandaleusement banale » a-t-on pu lire ensuite sur Internet où beaucoup de commentaires ont fustigé l’initiative du quotidien…

Il en est ainsi du ton général de ce journal qui parvient à traiter chaque jour l’ensemble de l’actualité française et mondial avec un incontestable professionnalisme.

Remarquons également que les huit pages sont entièrement consacrées à l’information : aucune publicité n’envahit les colonnes, ce qui fait qu’il y a davantage à lire dans ces huit pages quotidiennes pour adolescent(e)s que dans n’importe quel autre quotidien « gratuit » tel 20 minutes, Métro, Direct matin (ou Soir), Paru Vendu, pour ne citer que les titres le plus connus du genre.

Toutefois, le « dessin du jour » (N°3586 du 13 octobre 2011) de Yacine, dessinateur attitré du quotidien, à l’incontestable talent et à l’humour certain, pose peut-être un problème déontologique concernant justement ce quotidien de la jeunesse.

Yacine montre – nous sommes alors entre les deux tours de la « Primaire socialiste » – François Hollande, vautré par terre en train de lécher les pieds d’Arnaud Montebourg, tandis que Martine Aubry, à genoux derrière celui-ci affirme “vénérer” le troisième candidat de la compétition… Le commentaire accompagnant le dessin indique : « Primaire socialiste : Arnaud Montebourg courtisé avant le 2e Tour Hollande-Aubry »…
 
Sur le fond, rien de plus vrai, Hollande comme Aubry ont dû promettre à l’intéressé monts et merveilles pour le rallier à leur cause respective. Sur la forme, toutefois, la caricature impitoyable de l’humoriste est tout de même mal venue dans un quotidien qui entend inciter le public jeune à s’intéresser à la « vie publique » française et, leur majorité venue, à y participer activement. Car quoi que l’on pense des deux finalistes socialistes, l’une comme l’autre était alors susceptible d’accéder à la Fonction Suprême et le vainqueur du deuxième tour l’est aujourd’hui, plus que jamais.

Après un ancien président de la République traîné devant les tribunaux où il n’a pas comparu pour cause de prétendu gâtisme, avec un actuel locataire de l’Élysée suspecté de compromissions financières dans le financement de campagnes électorales passées, sans compter un candidat donné favori des sondages, éliminé de la course aux motifs de scandales sexuels à répétition, notre « belle jeunesse » a besoin d’avoir le cœur sacrément bien accroché ; comment pourrait-elle se passionner d’une prochaine échéance électorale où l’un des prétendants les plus sérieux à la victoire ne serait, somme toute, que cet être rampant et prêt à toutes les humiliations pour l’emporter ?

Ne faisons aucun procès d’intention à l’humoriste et selon l’honnêteté du quotidien tel que je n’ai pas manqué de le reconnaître, gageons qu’il puisse de même réserver un traitement identique à chaque candidat de la prochaine élection présidentielle. Mais un tel dessin ne me semble guère compatible avec les louables intentions des concepteurs de L’Actu.

À la question « Peut-on rire de tout ? », Pierre Desproges répondait : « Oui, mais pas avec tout le monde »… Il est sans doute plus certain encore qu’on peut rire de tout le monde, mais peut-être pas n’importe où…

11:13 Publié dans La chronique de Philippe Randa | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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