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mardi, 22 novembre 2011

De présumé réinsérable à présumé récidiviste...

Philippe Randa 5.jpgLa chronique de Philippe Randa
 
Viol, meurtre, récidive : qu’est-ce que le meurtre d’Agnès, collégienne de 13 ans par Mathieu, agresseur sexuel récidiviste de 17 ans, n’est d’autre qu’un énième fait-divers ? Il est certes abominable, comme tous les autres précédemment et comme tous ceux qui surviendront dans le futur. Déjà vu, connu, entendu, commenté, condamné et dans les mêmes termes, les mêmes indignations, à défaut de l’avoir été par les mêmes protagonistes…

Comme d’habitude, ces derniers jours, les journalistes ont traqué les proches de la jeune fille pour filmer leurs douleurs, enregistrer leurs colères et accroître ainsi leur audimat, tandis que l’Opinion publique s’est à juste titre indignée une fois de plus d’un tel drame et que police, justice et corps médical se rejetaient les uns sur les autres la responsabilité de celui-ci…

Le Ministre de l’Intérieur en a profité pour déclarer à nouveau “qu’on allait voir ce qu’on allait voir”, c’est-à-dire que les beaux jours des criminels allaient être comptés ; et éternellement recomptés, d’ailleurs.
 
L’occasion, aussi, fut donnée au Garde des Sceaux de passer “au 20 heures” – toujours intéressant pour sa notoriété – où il annonça qu’une réunion d’urgence avait eu lieu et qu’on étudiait sérieusement, et plus que jamais ! les mesures à mettre en place qui permettraient que, etc., etc. Pour les phrases exactes, on se référera à n’importe quelle intervention des Gardes des Sceaux passés : celle de Michel Mercier, actuellement en poste, ne dérogeant nullement à la coutume, puisque hier en fin de journée, après une réunion à Matignon, il a annoncé que, “dorénavant, tout mineur ayant commis un crime sexuel particulièrement grave doit être placé en centre éducatif fermé.

On appréciera tout particulièrement la formule “doit être”, lourde de quelques légitimes suspicions… On aurait préféré “va l’être”, avec éventuellement effet rétroactif pour les acteurs de crimes sexuels déjà connus, mais bon !

Toutefois, le calvaire de la jeune Agnès qui n’aura connu que treize ans de vie pour avoir été scolarisée au mauvais collège au mauvais moment, diffère quelque peu par une information rarement entendue par le passé. Elle concerne le monde médical et plus précisément les psychiatres, ces intervenants souvent pris à parti par l’Opinion publique pour n’avoir su détecter à temps la dangerosité des “clients” (ils n’aiment pas ce mot, ils préfèrent “patients”) livrés à leur sagacité.

L’explication est enfin donnée, il était temps ! C’est que “La récidive n’est pas leur priorité”… Et comme on a pu le lire dans Le Figaro (21 novembre 2011) : “Les psychiatres chargés du suivi des délinquants sexuels, même dans un cadre judiciaire, se situent principalement du point de vue de leur patient – un patient particulier car il a été contraint par le juge à se soigner. La réduction du risque de récidive est l’objectif de soins fixé par un psychiatre sur trois seulement. Un quart des médecins n’attribuent même aucun objectif au traitement en cours. “Dans de trop nombreux cas, explique Alexandre Baratta (psychiatre au centre hospitalier de Sarreguemines en Moselle), le médecin se contente de recevoir le délinquant sexuel qui lui-même vient pour que lui soit délivrée une attestation de suivi qu’il devra remettre à la justice”. Les délinquants sexuels font en effet souvent l’objet d’une “injonction de soin” de la part du juge, par exemple à la sortie de prison. Dans ce cas, pour préserver le secret médical, un médecin “coordonnateur” est désigné, chargé de veiller pour le compte de la justice à ce que le traitement ait lieu. Mais le médecin traitant reste le seul maître. Or, selon ces travaux, les psychothérapies classiques, seules, ne sont pas efficaces contre la récidive”.

Nul ne peut donc assurer que ce Mathieu – “très froid et sans émotion”, tel que Jean-Yves Coquillat, procureur de la République de Clermont-Ferrand, l’a qualifié, mais qui, jugé “réinsérable” par la Justice, n’avait été que placé sous contrôle judiciaire pour un précédent viol (sans meurtre) en août 2010 – ne sera pas dans le futur jugé à nouveau “réinsérable”, soit libre de défrayer à nouveau la chronique judiciaire quelques mois après sa libération. Ainsi en va-t-il de notre présumé Justice…

On notera que seules les victimes sont rarement déclarées présumées, elles !

15:14 Publié dans La chronique de Philippe Randa | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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