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lundi, 02 avril 2018

Lettres de sang du Donbass

Donbass-187x300.jpgGeorges Feltin-Tracol

La guerre au Donbass dans l’Est de l’Ukraine ne fait plus les gros titres de l’information hexagonale. Les médiats officiels préfèrent se focaliser sur le sort de la Ghouta et l’avenir de ces malheureux rebelles islamistes déchiquetés par les redoutables bombes russo-syriennes. Faisant fi de toute complexité inhérente au contexte, les journalistes enrégimentés gardent leurs œillères manichéennes. Le conflit dans le Donbass ne correspond pas à leur vision binaire « Gentils contre Méchants ».

Ces professionnels le comprendraient s’ils prenaient la peine de lire le nouvel ouvrage de Zakhar Prilepine, préfacé par Monique Slodzian et postfacé par Daria Sinichkina, Ceux du Donbass. Chroniques d’une guerre en cours (Éditions des Syrtes, 2018, 409 p., 22 €). Vétéran des guerres de Tchétchénie dans les forces spéciales, Prilepine est devenu l’« enfant terrible » des Lettres russes. Cet ancien adhérent du Parti national-bolchevique de l’écrivain Édouard Limonov vit à Donetsk et combat aux côtés des « séparatistes ».

Son livre rassemble des témoignages d’habitants pro-russes de la région parmi lesquels le célèbre Motorola et l’actuel président monarchiste de la République populaire de Donetsk, Alexandre Zakhartchenko. On saisit mieux maintenant le caractère syncrétique des sécessionnistes qui amalgament passé soviétique et héritage tsariste, nostalgie de l’URSS et désir de rejoindre un grand-espace eurasiste, défense des acquis sociaux et préservation des traditions populaires.

Certes, si au fil des pages, on rencontre des personnages attachants et sincères comme la poétesse Ania ou le Géorgien Teïmouraz, les chroniques de Prilepine demeurent subjectives et engagées. Ayant grandi dans la patrie des soviets et connu jeune adulte la déflagration de l’Union Soviétique, l’auteur n’est pas loin de penser que les affrontements sur les lieux mêmes de la Grande Guerre patriotique de 1941 – 1945 répètent la lutte tragique entre le monde russe représenté par les républiques de la Novorossia, et un Occident brutal et revanchard incarné pour la circonstance par les nationalistes ukrainiens.

On ne peut que regretter le sang versé dans cette terrible guerre fratricide qui a pourtant donné une grande œuvre à la littérature contemporaine russe.

Bonjour chez vous !

• « Chronique hebdomadaire du Village planétaire », n°72, diffusée sur Radio-Libertés, le 30 mars 2018.

10:44 Publié dans Georges Feltin-Tracol | Lien permanent | Commentaires (0) | |  Facebook | |

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