vendredi, 04 janvier 2013
Mais que fout Marine Le Pen ?
Gabrielle Cluzel
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« Mais que fout donc Marine Le Pen ? » Telle est la question lancinante que se posent un nombre croissant de ses électeurs, déroutés par ses atermoiements quant à sa participation à la manif contre le mariage pour tous, qu’ils soient issus de la vieille droite traditionnelle, pour lesquels on ne badine pas avec la famille, des déçus de l’UMP qui ne pensaient pas encore une fois se trouver forcés de suivre le panache blanc de Copé, ou des transfuges de la gauche qui n’ont pas changé de camp pour gober mollement les délires du nouveau gouvernement.
Les plus déçus sont ceux qui croyaient le plus en elle, ceux qui répétaient à qui voulait l’entendre qu’avec son discours incisif et son ironie dévastatrice, elle était capable de réduire un Manuel Valls à l’état de danseur de Flamenco pour thé dansant. Ceux qui s’étaient imaginé voir en elle un rempart du bon sens contre le non sens, de la loi naturelle contre les constructions idéologiques, des idées simples que l’on dit simplistes parce que leur évidence dérange. Que la mère patrie, comme toutes les mères, ait le devoir de prendre soin d’abord de ses enfants, de les loger, de les nourrir, de les protéger avant d’ouvrir sa maison à tous vents et d’accueillir en masse les enfants des autres (à la reconnaissance toute relative) est l’une d’entre elles. Qu’un enfant ne puisse naître que de l’union d’un père et d’une mère en est une autre. Pas moins essentielle. Et de celle-là, Marine Le Pen se battrait les cuisses ?
Il se dit dans la presse qu’elle est « embarrassée ». Ses électeurs en restent pantois. Depuis quand leur grande blonde serait-elle du genre à se tortiller sur un pied en se rongeant les ongles ? L’objet de la manif n’est pourtant pas l’une de ces causes perdues dans lesquelles elle leur a expliqué ne plus vouloir laisser son parti se fourvoyer, au motif que ces vieilles lunes encombrantes empêcheraient d’aller de l’avant, de se concentrer sur le combat d’aujourd’hui. Quelle cause, s’interrogent-ils, serait plus actuelle que celle du 13 janvier ? Mieux que le combat d’aujourd’hui, celui de demain, de l’avenir des Français à naître.
Elle risquerait de jouer le supplétif de Copé ? Ils se marrent. Ils savent bien que si ces deux-là se retrouvaient à battre le pavé de concert, le plus embarrassé des deux ne serait pas la présidente du FN. De s’enfermer dans un « catholand » réputé peu porteur ? Mais comment croire que son électorat le plus démuni, de Moselle ou du Pas-de-Calais, qui ne croit ni à Dieu ni à diable, voit vraiment d’un bon œil l’idée de rembourser des PMA pour des drôles de stérilités dont on pourrait à coup sûr venir à bout avec une méthode ancestrale de procréation à domicile, bien plus bio, efficace et économique, quand lui-même n’a pas de quoi s’offrir un dentiste ?
On leur chuchote enfin qu’il faudrait chercher une explication ailleurs. Dans le fait que dans les sphères politiques, et notamment au Front national, il est une minorité plus ou moins visible, influente et surreprésentée — car elle n’aurait pas (encore) à la maison une famille qui l’attendrait et s’accommoderait donc du mode de vie de saltimbanque qu’exige un engagement politique — que cette mobilisation contre le mariage gay défriserait.
Mais ils ne veulent pas faire l’insulte à cette minorité-là de penser qu’elle ne verrait pas plus loin que le bout de sa braguette. Qu’elle serait capable de mettre en balance le bien de son pays avec son orientation sexuelle.
Alors ces électeurs du FN disent entre haut et bas qu’ils ne veulent pas y croire. Que leur candidate, emboîtant le pas de sa nièce et de son rival d’hier à la tête du parti, finira par descendre dans la rue le 13 janvier. Car ils pressentent bien que, sinon, cette indécision politiquement peu lisible pourrait bien être pour elle un faux pas difficile à rattraper.
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