Libraire à contre courant, Xavier de Marchis avoue n'avoir pas lu le fameux livre de Valérie Trierweiler. «Je ne l'ai pas reçu et j'ai refusé de l'avoir», tranche-t-il d'emblée.
Gérant de la librairie Contretemps à Paris dans le 7e arrondissement, il trouve le marketing autour de Merci pour ce moment «un peu limite» : ce jeu autour d'un livre lancé sous XX, imprimé en Allemagne au tirage foudroyant de 200 000 exemplaires lui semble malsain. Pire, il est choqué par la façon dont les gens viennent lui demander le livre. Selon lui, toute cette hystérie «a créé un climat d'énervement et d'excitation qui a empêché sa librairie de tourner pendant deux jours». Samedi matin, 48 heures après le lancement du livre événement, il décide donc avec ses collègues de mettre un panonceau à l'entrée de la librairie. Avec ces quelques mots ironiques :
«Nous sommes libraires. Nous avons 11 000 livres. Nous n'avons pas vocation à être la poubelle de Trierweiler et Hollande. «Merci pour ce moment» de compréhension.» Le jour même, les passants viennent lui exprimer leur sympathie. Et depuis, il reçoit de nombreux messages de soutien. Invité de France Info ce lundi matin, Xavier de Marchis avoue même que les journalistes rencontrés ont compris et partagé sa démarche.
S'il réagit par souci d'éthique, le jeune libraire reconnaît pourtant avoir vendu le livre de Marcela Iacub, Belle et Bête (Stock), où la journaliste dévoilait sa liaison avec Dominique Strauss-Kahn, tout comme celui de Cécilia Attias, Une Envie de vérité (Flammarion), mais de façon minime. «Il n'y avait pas d'exclusivité. Avec Trierweiler, j'ai subi un arrêt complet de mes ventes. Les gens ne demandaient que ça.»
«Libraires, faites gaffe!»
Pour le libraire de la rue Cler, la publication du livre de Valérie Trierweiler participe à la remise en cause ambiante de sa profession. Le cœur du travail de libraire est de choisir des livres et de les donner à lire. «Sinon, je mets une casquette, j'installe un guichet, et je vends les livres qui marchent. Comme au McDo, quoi». Pour Xavier de Marchis, c'est là «l'image de la librairie en Enfer». Celle d'un étalage où un seul livre supplante tous les autres.
Le gérant de Contretemps tient même à lancer un message aux autres libraires. «Notre métier, ce n'est pas ça. Je dis aux libraires, faites gaffe ! Ce n'est pas sain pour vous. Un jour on ne se retrouvera plus qu'à vivre avec les dix sorties médiatiques de l'année.» À l'occasion de cette rentrée littéraire qu'il juge «ignorée» par la sortie de Merci pour ce moment, l'intéressé rappelle qu'il a de quoi satisfaire ses clients. Aux «intrigues de palais déplorables de Valérie Trierweiler», il conseille plutôt la lecture de deux beaux romans: L'Île du Point Némo de Jean-Marie Blas de Roblès et Le Complexe d'Eden Bellwether de Benjamin Wood (Editions Zulma).
Les commentaires sont fermés.