dimanche, 21 février 2016
Syrie: la Turquie torpille les accords de Munich
Martial Roudier Lengadoc info cliquez ici
Point de situation numéro 3 – Depuis que les pourparlers de Genève pour la Syrie ont été interrompus pour être reportés, un espoir de cessez le feu est apparu lors des accords de Munich le vendredi 12 février. En effet, les deux grandes puissances que sont les Etats Unis et la Russie avaient convenu d’un arrêt des bombardements hormis sur les troupes d’Al Qaida et de Daesh. Etant convenu que Daesh est devenu le « meilleur ennemi des grandes puissances », cet accord apparaissait tout de même comme une grosse avancée en terme diplomatique.
Syrie: situation à la frontière turque
Las! il n’a pas fallu attendre très longtemps pour que cet espoir ne vole en éclats. En éclats d’obus plus précisément ! Et de la part d’un intervenant dont nous avions déjà souligné la duplicité.
En effet, deux jours seulement après ces accords, la Turquie s’est empressée d’intervenir depuis sa frontière et s’est mise à bombarder massivement afin de contrer une offensive d’ampleur qui a eu lieu la semaine dernière au sud de son territoire. Les troupes de l’Etat Islamique auraient elles trouvées un regain d’énergie sous forme de fanatisme religieux dopé au Captagon ? Si tel avait été le cas, l’armée turque aurait eu le soutien de la Communauté Internationale et même le mien! Mais les troupes bombardées sont celles des forces kurdes (PYD et YPG) qui sont l’ennemi générationnel du président turc M. Erdogan.
En effet, bénéficiant de l’avancée des forces pro-gouvernementales au nord d’Alep autour de l’ex-poche de Zarhaa ainsi que de l’appui aérien russe, les forces kurdes de la province d’Afrin ont fait mouvement en direction de l’Est. Elles se sont emparées d’un territoire important et se trouvent désormais directement au contact de l’Etat Islamique dans ce fameux couloir tenu il y a peu par les FSA et le Front Al-Nosra. La teneur des accords entre les forces kurdes et les forces loyalistes ainsi que celles de Moscou n’est pas très claire mais il est indéniable que les forces kurdes bénéficient d’un régime de faveur. Ils « bénéficient » également de bombardements incessants de la part de la Turquie qui n’hésite pas à jeter de l’huile sur le feu pour son propre intérêt en prétextant un attentat à la voiture piégée survenu dans la capitale Ankara mercredi 17 février.
Déploiement massif de matériel militaire donc à la frontière turco-syrienne coté turc. Beaucoup d’artillerie ainsi que des chars et de l’aviation qui pourraient présager d’une invasion terrestre du nord de la Syrie. Rappelons que la Turquie est bien évidement membre de l’OTAN (depuis 1952) et que ses multiples provocations envers la Russie et les bombardements des forces kurdes pourraient avoir de graves conséquences par le fait des liens unissant les pays membres du traité nord atlantique en cas d’agression de l’un des signataires. Rappelons également pour illustrer la complexité locale, que les forces kurdes sont armées et formées directement, entre autres, par les Etats Unis.
Syrie: état sur le reste du front
Les combats sont âpres à l’Ouest d’Alep qui reste la ville à libérer pour les forces loyalistes… Et par conséquent, à conserver pour les forces adverses. Des troupes rebelles venues du front sud sont en route par l’autoroute M5 pour renforcer cette zone.
Au nord immédiat d’Alep subsiste le quartier kurde de Sheikh Maqsoud complètement enclavé par les loyalistes au sud et par les rebelles pour le reste. Les combattants de ce quartier ont tenté il y a une semaine une percée en territoire rebelle qui fut un échec cuisant.
Directement à l’Est autour de l’aéroport de Qweires, l’avancée loyaliste poursuit son cours et la fameuse centrale thermique a été libérée des forces jihadistes.
Au nord ouest du pays, les forces de Bachar El-Assad ont progressé dans les montagnes et ont libéré la ville de Kinsabba situé à dix kilomètres au nord de Salma qui était le verrou de toute la zone montagneuse aux mains des rebelles. Cette zone est capitale puisqu’elle est frontalière avec la Turquie et permettra l’accès à la ville d’Idlib.
Le reste du front reste stable, c’est à dire que de durs combats ont lieu un peu partout mais qu’aucune avancée significative n’est signalée. Un point malgré tout, complètement au Nord Est de la Syrie, où les forces kurdes ont effectué une avancée majeure en territoire tenu par Daesh et viennent de s’emparer de la ville d’Ash Shaddadi et d’une usine de production de gaz.
Sans tomber dans un alarmisme de roman de gare, les termes de « Guerre Froide » et de « Troisième Guerre Mondiale » n’auront pas été autant d’actualité depuis longtemps.
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