mercredi, 25 juin 2025
L’éléphant Trump dans le magasin de porcelaine de la diplomatie
Alexis Murbas
Depuis (…) son entrée en fonction, Donald Trump enchaîne les déclarations chocs en matière de politique étrangère (…). Son objectif manifeste ? Tordre le bras des destinataires afin de les contraindre à ouvrir des négociations, à infléchir certaines de leurs positions ou de leurs pratiques, bref à céder devant ses exigences. Qu’on se le dise : le maître, c’est lui ! Comme le déclare, dans le numéro de la revue de géopolitique Conflits de mars-avril 2025, James Jay Carafano, un ancien conseiller du président américain lors de son premier mandat, « il faut voir (dans ses propos) une manière pour Trump de signaler qu’il y a littéralement un nouveau shérif en ville, ou dans l’hémisphère (occidental) ».
(…) Donald Trump, à travers ses différentes interventions, provocations, entorses à la bienséance, à la courtoisie matoise des diplomates, se donne à voir tel qu’il est : brut de décoffrage ; et tel qu’il entend agir : vite et sans prendre de gants. Durant la campagne électorale, il l’a dit et répété : « America first ! Make America great again ! » Il est américain. (…) . Sa grande affaire, ce sont les intérêts, la prospérité, la puissance des États-Unis, c’est le business qui permet le renforcement de cette dernière. Selon les formules utilisées par Jean-Baptiste Noé, le rédacteur en chef de Conflits, il est là pour régler « les problèmes de l’Amérique qui souffre », satisfaire « les besoins de l’Amérique qui innove », « marquer » son opinion publique et « laisser un héritage intellectuel et moral ». Point barre. Sa logique se situe dans la tradition du pays depuis le XIXe siècle : elle est impériale ; et son projet est impérialiste.
(…) Les Européens, placés face aux conséquences de leur inconséquence et de leur aveuglement volontaire, n’ont plus qu’à se prendre en main, si tant est qu’ils en aient la volonté et qu’ils en soient capables ! En effet, la grande préoccupation de Trump et des forces vives de son pays, c’est la Chine, c’est le Pacifique. Son Amérique souhaite conserver son leadership mais elle ne veut plus prendre en charge une bonne partie de la défense de l’Europe à la place des habitants de cette dernière ; elle veut que la sécurité du vieux continent lui coûte moins cher ; et en même temps, elle entend qu’elle lui rapporte toujours autant, voire davantage, notamment grâce aux ventes d’armes… En un mot, elle veut, encore et toujours, le beurre et l’argent du beurre !
Face à cette emprise qui n’a que trop duré, il appartient désormais à chaque peuple européen de porter aux affaires des dirigeants uniquement soucieux de défendre leur souveraineté, leur identité, leur sécurité. Il leur appartient de substituer à la boursouflure européenne actuelle, à sa bureaucratie, à son inflation normative, à son impuissance, une Europe des nations où des coopérations à géométrie variable autour de grands projets (industriels, scientifiques, militaires…) permettront d’affirmer, face au reste du monde, la volonté, le dynamisme et la force de nos vieilles patries rassemblées autour de leur civilisation commune (enfin assumée et revendiquée). En attendant, face aux gesticulations chaotiques de l’éléphant Trump, destinées à « déstabiliser un peu tout le monde », il faut, selon la formule d’Hubert Védrine, sur BFM, le 14 mars dernier, « garder son sang-froid parce que ça va rebondir toutes les trois minutes » !
Extrait d'un article paru dans le n°69 de Synthèse nationale (printemps 2025).
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